mercredi 5 décembre 2012

De l’«abordabilité» des études postsecondaires

par Raymond Blanchard, agent de recherche et de projets

À la lumière de la grogne qui sévit actuellement, j’ai jugé pertinent d’éclaircir la signification exacte de la notion d’«abordabilité» des études qui soulève – à juste titre - les passions des étudiant(e)s de l’Université de Moncton.

Premièrement, il faut établir la distinction entre des études «abordables» et des études «bon marché» : quand nous disons abordables, cela signifie précisément que, peu importe la manière dont l’étudiant(e) parvient à financer ses études cette année, ces moyens devraient être suffisants pour s’acquitter de ses frais de scolarité et des dépenses associées pour la durée de ses études, même en présence d’une hausse – ce qui est une réalité plus qu’une possibilité – des frais de scolarité.

Le phénomène de l’inflation n’épargne personne : votre épicerie, votre essence, votre loyer, votre électricité, vos vêtements, vos livres, vos loisirs vous coûteront toujours plus cher d’année en année, dû au fait que l’augmentation des salaires, à la base de la hausse du coût des matériels et des services, doit répondre à la hausse du coût de la vie, causée par l’inflation. C’est un cercle vicieux. Et les vicieux sont souvent persistants.

Si on regarde la tendance 5 ans au Canada en ce qui concerne l’augmentation des doits de scolarité, on constate une augmentation moyenne de 147$ par année depuis 2008-2009 :
Source

C’est donc dire que l’on est en droit de s’attendre à une hausse des frais de scolarité, si la tendance se maintient. Mais la chose n’équivaut pas à dire que la FÉÉCUM recommande au gouvernement d’augmenter les frais de scolarité. Au contraire, on voit le coup venir et on cherche des moyens pour limiter les bleus. Des moyens applicables dans le court terme, s’entend.

Si on regarde l’évolution du taux d’inflation au cours des 5 dernières années :
Source  

Vous voyez qu’en moyenne, le coût de la vie a augmenté de 1,7% par année au Canada depuis 2008. Cela signifie que le coût d’à peu près tout a augmenté suivant ce taux. Certains biens et services plus, d’autres moins, mais nous parlons d’une moyenne pour les biens de la cause.

Or, les coûts de l’éducation postsecondaire ne suivent pas l’inflation ; ils leur font manger de la dust. Au Canada, l’augmentation moyenne des droits de scolarité a été de 268$ en 2012, ce qui représente une hausse de 4,8% sur l’an dernier. Au N-B, une hausse moyenne de 189$ représente un bond de 3,2%. Même situation en N-É (212$, soit +3,6%) et à l’I-P-É (212$, soit +3,9%).

Dans un blogue précédent (L’éduflation) je vous ai déjà donné un aperçu de ce que pourraient être vos frais de scolarité aujourd’hui, s’ils avaient suivi le cours de l’inflation depuis le début des années 1990. Ça fait peur.

L’écart entre la hausse des frais et l’inflation est marqué, et malgré un plafonnement de la hausse imposée par le N-B aux universités publiques de la province, la facture continue d’augmenter pour les étudiants, même si ils et elles n’en assument pas la totalité en raison de la gymnastique budgétaire des universités. Quand la FÉÉCUM recommande à la province de signer une entente de financement pluriannuelle avec les universités, c’est pour permettre aux universités de prévoir l’impact de l’inflation et d’agir en conséquence, ce qui devrait, en principe, leur permettre de maintenir des frais de scolarité abordables, au sens où des hausses potentielles ne dépasseront pas l’inflation. C’est quand les augmentations dépassent cette marque que les effets se font le plus durement ressentir, car les ressources financières additionnelles ne parviennent pas à la compenser.

Abordables, pas raisonnables, pas agréables : abordables.

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