par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
C’est reparti pour un tour! Avec la rentrée scolaire et universitaire qui se fait imminente, l’éducation redevient un sujet d’actualité. Et, avec le bouillonnement qui s’est quand même poursuivi à feu doux depuis votre départ en avril dernier, les choses devraient reprendre à un rythme accéléré!
L’argent, l’argent, l’argent – les quotidiens du pays n’ont parlé que ce ça cette semaine; que ce soit vu de l’angle du (trop faible) retour sur l’investissement (CBC), du salaire des diplômés (Le Devoir; Radio-Canada), ou des perspectives décevantes au niveau de l’emploi pour les diplômés des «sciences molles» (Globe and Mail), le tout livré sur un ton de fausse sympathie masquant à peine la condescendance, nous avons été bien servis de ce côté.
Mais également, et peut-être surtout, ce thème s’est développé en lien avec les stratégies d’action économique des gouvernements fédéral et provincial. Au N-B, le gouvernement Alward semble décidé à former une génération de soudeurs et de pipefitters pour l’oléoduc Ouest-Est (Radio-Canada), et le gouvernement Harper – par l’entremise de Bernard Valcourt- annonce des investissements dans le nord du N-B pour la création de stages rémunérés dans les entreprises de la région (Radio-Canada). Pas des emplois, là; des stages de 3 à 6 mois en entreprise, et rien qui ne garantit que de nouveaux emplois pourront être créés par la suite.
Au pire, les compétences acquises seront très utiles quand ces nouveaux diplômés postuleront pour des emplois ailleurs. Que de vision!
On vous invite à visiter le blog de la FÉÉCUM (http://www.feecum.blogspot.ca) pour notre analyse de ces annonces. Ou, bon, scrollez down la page, ça marche aussi!
Ce fatras d’initiatives mal éclairées a poussé la FÉÉCUM à se prononcer contre cette tangente voulant donner la priorité à la formation -au détriment de l’éducation- et contre l’injection de fonds qui devraient être consacrés au système d’éducation dans le domaine privé (Radio-Canada). Le président de la FÉÉCUM, Kevin Arseneau, doute de la viabilité à long terme de la stratégie mise de l’avant par le gouvernement Alward, et remarque avec justesse que «l’éducation, c’est beaucoup plus que de la formation.»
L’AÉNB a, pour sa part, applaudi les «engagements ambitieux» du gouvernement avec cette nouvelle stratégie (AÉNB). Pour un organisme qui ne représente aucunement les étudiants du niveau collégial, ça peut sembler un tantinet bizarre…
On devrait avoir droit à un automne plutôt intéressant!
vendredi 30 août 2013
jeudi 29 août 2013
Valcourt d’idées
par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
Hé bien, on peut au moins se féliciter d’avoir su identifier tôt la tendance de la rentrée!
Le 28 août, Bernard Valcourt était de passage à Campbellton pour promouvoir la dernière initiative du gouvernement fédéral, la Subvention canadienne pour l’emploi (SCE). LA SCE vise spécifiquement à «rapprocher employeurs et chercheurs d’emplois» partout au Canada. La somme totale de 24 M$ seront investis par le fédéral d’ici mars 2014 pour financer, en partie, 1900 stages rémunérés en milieu de travail partout au Canada.
En principe, cela doit permettre aux nouveaux diplômés qui peinent à se trouver un emploi dans certains domaines spécialisés d’acquérir l’expérience qui leur manque pour trouver un emploi.
Valcourt annonçait donc que 1,2 M$ de cette somme seront attribués à une firme de Campbellton pour jumeler 144 nouveaux diplômés avec des employeurs de la région.
Les stages ainsi subventionnés doivent être d’une durée de 12 à 26 semaines, soit entre 3 et 6 mois.
Le pourcentage de cette somme qui sera retenu par la firme pour ses services n’est pas mentionné; à vrai dire il n’est pas dit si le cachet de la firme doit être retranché de la somme annoncée hier. Il est très possible que cette part des coûts ne fasse tout simplement pas partie des données dévoilées par le gouvernement.
Malheureusement, il s’agit d’un autre exemple d’un flagrant manque de vision à long terme de la part du gouvernement. Le programme peut, en théorie, avoir des retombées instantanées : 144 stages passablement bien rémunérés dans la région.
C’est bien joli tout ça, mais après les 3 à 6 mois pendant lesquels le stage sera subventionné, y aura-t-il un emploi qui va attendre la personne qui en a bénéficié? Le salaire de crève-faim que la compagnie peut se permettre de verser au stagiaire va-t-il doubler comme par enchantement? Va-t-on combiner quatre parts de stages en une position? Et, plus important encore : ont-elles l’intention d’embaucher?
Si les entrepreneurs de la région ont tant besoin d’employés qualifiés, pourquoi n’ont-ils pas déjà approché le CCNB, les CEGEPS, les écoles techniques et que sais-je encore pour établir ce lien avec les diplômés? Personne ne crachera sur un emploi stable dans le Nord de la province, ça je peux vous le garantir.
Et avec la mine Brunswick qui vient de cesser ses opérations, nul doute qu’il y aurait là un bassin de main-d’œuvre à exploiter. L’a-t-on fait?
A-t-on les moyens de créer, dans la région et avant l’échéance de ces stages rémunérés, 144 emplois dans des domaines hautement spécialisés?
Le porte-parole de la firme chargée du projet a déclaré qu’ «à la fin des stages, ce qu’on espère, c’est que les jeunes demeurent dans les entreprises»… Qu’il soit clair que ce sont des stages qui seront créés, et non pas des emplois.
Qu’est-ce à dire? Doute-t-on de la capacité des entreprises à créer les emplois nécessaires pour les garder dans la région, ou doute-t-on de la volonté des stagiaires de demeurer dans ces entreprises? On veut permettre aux nouveaux diplômés d’acquérir de l’expérience en milieu de travail -ce qui est louable- sans prendre de mesures pour que ce milieu de travail ne soit pas en-dehors de la province au bout de trois à six mois. On les forme pour travailler où, ces stagiaires, au juste?
Et c’est à ÇA, monsieur Valcourt, que le gouvernement Harper devrait réfléchir avant de se gausser d’initiative et d’innovation.
Une des grandes préoccupations dans le nord du N-B est l’exode des travailleurs: comment ce programme se propose-t-il d’y remédier DURABLEMENT? Les entrepreneurs n’ont clairement pas les moyens d’embaucher plus de gens – ils le feraient. Les entreprises n’ont clairement pas BESOIN de plus d’employés – elles n’ont pas les moyens d’étendre leurs opérations. Cette fausse prémisse à la base de la SCE, qu’il y a une pénurie de main-d’œuvre qualifiée au Canada, n’est qu’un écran de fumée visant à occulter la vérité des faits : les grandes entreprises ne veulent pas dépenser plus d’argent, elles veulent en recevoir plus du gouvernement. Investir ses profits au lieu de les engranger tiendrait du blasphème!
Si l’argent et la volonté y étaient, ces compagnies embaucheraient de la main-d’œuvre possédant des qualifications pertinentes, et dépenseraient cet argent qu’elles se meurent supposément de donner aux Canadiens pour les FORMER.
Ce n’est pas la responsabilité de l’État de le faire. Mais malheureusement, c’est de plus en plus évident que c’est la voie sur laquelle le Canada s’engage.
Bernard Valcourt |
Le 28 août, Bernard Valcourt était de passage à Campbellton pour promouvoir la dernière initiative du gouvernement fédéral, la Subvention canadienne pour l’emploi (SCE). LA SCE vise spécifiquement à «rapprocher employeurs et chercheurs d’emplois» partout au Canada. La somme totale de 24 M$ seront investis par le fédéral d’ici mars 2014 pour financer, en partie, 1900 stages rémunérés en milieu de travail partout au Canada.
En principe, cela doit permettre aux nouveaux diplômés qui peinent à se trouver un emploi dans certains domaines spécialisés d’acquérir l’expérience qui leur manque pour trouver un emploi.
Valcourt annonçait donc que 1,2 M$ de cette somme seront attribués à une firme de Campbellton pour jumeler 144 nouveaux diplômés avec des employeurs de la région.
Les stages ainsi subventionnés doivent être d’une durée de 12 à 26 semaines, soit entre 3 et 6 mois.
Le pourcentage de cette somme qui sera retenu par la firme pour ses services n’est pas mentionné; à vrai dire il n’est pas dit si le cachet de la firme doit être retranché de la somme annoncée hier. Il est très possible que cette part des coûts ne fasse tout simplement pas partie des données dévoilées par le gouvernement.
Malheureusement, il s’agit d’un autre exemple d’un flagrant manque de vision à long terme de la part du gouvernement. Le programme peut, en théorie, avoir des retombées instantanées : 144 stages passablement bien rémunérés dans la région.
C’est bien joli tout ça, mais après les 3 à 6 mois pendant lesquels le stage sera subventionné, y aura-t-il un emploi qui va attendre la personne qui en a bénéficié? Le salaire de crève-faim que la compagnie peut se permettre de verser au stagiaire va-t-il doubler comme par enchantement? Va-t-on combiner quatre parts de stages en une position? Et, plus important encore : ont-elles l’intention d’embaucher?
Si les entrepreneurs de la région ont tant besoin d’employés qualifiés, pourquoi n’ont-ils pas déjà approché le CCNB, les CEGEPS, les écoles techniques et que sais-je encore pour établir ce lien avec les diplômés? Personne ne crachera sur un emploi stable dans le Nord de la province, ça je peux vous le garantir.
Et avec la mine Brunswick qui vient de cesser ses opérations, nul doute qu’il y aurait là un bassin de main-d’œuvre à exploiter. L’a-t-on fait?
A-t-on les moyens de créer, dans la région et avant l’échéance de ces stages rémunérés, 144 emplois dans des domaines hautement spécialisés?
Le porte-parole de la firme chargée du projet a déclaré qu’ «à la fin des stages, ce qu’on espère, c’est que les jeunes demeurent dans les entreprises»… Qu’il soit clair que ce sont des stages qui seront créés, et non pas des emplois.
Qu’est-ce à dire? Doute-t-on de la capacité des entreprises à créer les emplois nécessaires pour les garder dans la région, ou doute-t-on de la volonté des stagiaires de demeurer dans ces entreprises? On veut permettre aux nouveaux diplômés d’acquérir de l’expérience en milieu de travail -ce qui est louable- sans prendre de mesures pour que ce milieu de travail ne soit pas en-dehors de la province au bout de trois à six mois. On les forme pour travailler où, ces stagiaires, au juste?
Et c’est à ÇA, monsieur Valcourt, que le gouvernement Harper devrait réfléchir avant de se gausser d’initiative et d’innovation.
Une des grandes préoccupations dans le nord du N-B est l’exode des travailleurs: comment ce programme se propose-t-il d’y remédier DURABLEMENT? Les entrepreneurs n’ont clairement pas les moyens d’embaucher plus de gens – ils le feraient. Les entreprises n’ont clairement pas BESOIN de plus d’employés – elles n’ont pas les moyens d’étendre leurs opérations. Cette fausse prémisse à la base de la SCE, qu’il y a une pénurie de main-d’œuvre qualifiée au Canada, n’est qu’un écran de fumée visant à occulter la vérité des faits : les grandes entreprises ne veulent pas dépenser plus d’argent, elles veulent en recevoir plus du gouvernement. Investir ses profits au lieu de les engranger tiendrait du blasphème!
Si l’argent et la volonté y étaient, ces compagnies embaucheraient de la main-d’œuvre possédant des qualifications pertinentes, et dépenseraient cet argent qu’elles se meurent supposément de donner aux Canadiens pour les FORMER.
Ce n’est pas la responsabilité de l’État de le faire. Mais malheureusement, c’est de plus en plus évident que c’est la voie sur laquelle le Canada s’engage.
mercredi 28 août 2013
Educa(sh)tion pour la nation!
par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
Il semblerait qu’on doive s’attendre à une rentrée sur le thème de l’éducation au service des besoins «criants» du marché du travail. La pénurie de main-d’œuvre qualifiée (le «skills gap» ou «skill shortage») ressort de plus en plus dans les discours politiques et économiques sur l’avenir de l’éducation, comme de la nation canadienne. Et ce, tant sur la scène fédérale que provinciale.
Au N-B, le gouvernement Alward a lancé cette semaine sa «stratégie de perfectionnement des compétences», visant à combler l’écart entre les besoins du marché et le nombre de diplômés dans les programmes susceptibles de contribuer à combler cet écart à courte échéance (Radio-Canada). On entrevoit, par exemple, des besoins grandissants en soudure ou en tuyauterie industrielle avec le développement du projet d’oléoduc de la compagnie TransCanada. Il faut, selon le gouvernement Alward et le ministre de l’éducation, de la formation et du travail, Danny Soucy, encourager les jeunes à s’éduquer dans ces domaines.
Il y a un problème majeur à considérer en ces termes la contribution de l’éducation postsecondaire à la société : comme l’a souligné l’article de David Caron ce matin dans l’Acadie Nouvelle (CapAcadie), il y a une différence entre former de la main-d’œuvre et éduquer de futurs citoyens. Cette différence, le gouvernement Alward ne semble pas la saisir, si l’on en juge par l’annonce faite plus tôt cette semaine.
D’entrée de jeu, sa stratégie de perfectionnement des compétences de la main-d’œuvre du Nouveau-Brunswick se limite à la période 2013-2016. On peut difficilement la qualifier de visionnaire. Ensuite, sa philosophie : «s’assurer que les Néo-Brunswickois possèdent les compétences nécessaires pour tirer profit des nouveaux débouchés», laisse entendre que les compétences en question ne vont pas bien au-delà de celles requises dans la construction d’un oléoduc.
L’oléoduc TransCanada, on en a déjà parlé en long et en large, inutile d’y revenir. Cependant, il y a une masse de facteurs qui doivent entrer en jeu si la stratégie du gouvernement Alward doit porter fruit : les nouveaux diplômés doivent être aptes à intégrer la force ouvrière début 2015, quand le début de la construction est prévu; TransCanada doit être ouverte à l’embauche de travailleurs nouvellement formés et inexpérimentés; elle doit aussi être disposée à embaucher de la main-d’œuvre locale, c’est-à-dire de ne pas puiser à même ses ressources humaines actuelles les spécialistes dont elle a besoin pour s’assurer d’une construction efficace, rapide (donc : économique) et sécuritaire.
TransCanada doit également être disposée à investir des sommes importantes dans la formation continue de ces nouveaux employés, de même qu’à accepter les délais engendrés par la période d’apprentissage sur le site de travail, la réparation des erreurs inévitables des travailleurs encore «verts», des accidents de travail dont le risque est plus élevé avec des travailleurs non-expérimentés, etc.
Et après tout cela, il faut encore que les emplois créés se poursuivent au-delà de la période de construction de l’oléoduc qui, comme on le sait, génère peu d’emplois à long terme en tant qu’infrastructure passive.
Ce sont les principaux obstacles à la stratégie du gouvernement, à première vue. Il faut admettre qu’il ne s’agit ici que de réflexions fondées sur le gros bon sens, et que nous n’avons pas devant nous les détails spécifiques de l’entente de construction (ou d’opération) de l’éventuelle infrastructure –si un tel document existe. Et espérons que oui parce que sinon, on va se retrouver avec un paquet de Néo-Brunswickois éduqués ici et qui doivent aller prêter leur expertise à des compagnies ailleurs au Canada ou en-dehors du pays. Un peu comme maintenant.
Et la stratégie (GNB) ne se limite pas au postsecondaire : dès la 9e année, le gouvernement compte informer les élèves «des secteurs prioritaires de croissance pouvant mener à un emploi éventuel, et des exigences d’études postsecondaires».
Problème à l’horizon : il faut que ces prévisions tiennent la route pour un minimum de trois à cinq, au cours desquels des individus déjà en formation auront eu le temps de combler au moins en partie les besoins du marché. Autre problème, une partie de la stratégie vise l’attraction et la rétention d’immigrants hautement qualifiés, qui vont venir combler à leur tour une part des positions supposément vacantes.
Quand on propose de former «des diplômés qui arrivent sur le marché du travail […] prêts à effectuer les tâches pour lesquelles ils ont été formés [et qui] doivent pouvoir répondre aux besoins actuels du marché et […] aider nos entreprises et notre secteur public à faire preuve d’innovation», on prétend pouvoir prédire les besoins futurs du marché, ce qui tient de l’aberration.
L’économiste Dan Drummond discrédite d’ailleurs la rhétorique conservatrice (fédérale) sur la pénurie de main-d’œuvre qualifiée (Toronto Star), qu’il juge dépourvue de toute évidence crédible. Ses arguments? Statistique Canada compte 6.3 ouvriers pour chaque position vacante au pays : cela suggère en effet un surplus de travailleurs et non une pénurie au plan des qualifications. Il rajoute qu’il n’existe pas de hausse marquée des salaires dans les domaines hautement spécialisés : si le manque était si criant, les compagnies s’arracheraient le «peu» de main-d’oeuvre qualifiée à prix d’or. Drummond fait aussi valoir qu’Ottawa est tout bonnement incapable de prévoir avec précision les besoin du marché de l’emploi car ses méthodes sont biaisées et ses sources peu fiables.
L’économiste estime possible, à ce stade, que la Subvention canadienne pour l’emploi, pièce maîtresse du plan d’action économique du gouvernement Harper, soit fondée sur une fausse prémisse. Ce ne serait pas une première pour les Conservateurs, qui ont augmenté les mesures de sécurité en raison d’une hausse des «crimes non-rapportés», alors que le taux de criminalité au pays était en baisse, aboli le formulaire long du recensement parce qu’il avait reçu la plainte de 10 000 citoyens disant qu’il constituait une violation de la vie privée alors que seulement 27 plaintes ont été enregistrées, et entraîné le pays dans le fiasco des F-35 en affirmant qu’il était le seul avion répondant aux besoins militaires du Canada, ce qui était -au mieux- une affirmation discutable.
Alors voilà, la stratégie du gouvernement Alward, en prônant un système d’éducation au service de l’industrie (en favorisant les programmes STEM (Sciences, Technologies, Génie et Mathématiques) ne semble pas innover durablement en fait d’éducation, en misant sur le court terme. S’il y a quelque chose que ce gouvernement nous a prouvé au fil de son mandat, c’est qu’il est plutôt tiède à l’idée de faire de grandes dépenses en fait d’infrastructures, et que les compagnies de l’extérieur ne font certainement pas pied-de-grue devant notre porte pour le faire à sa place.
Le but du gouvernement doit être en partie de retenir ici les gens formés ici. Je ne vois tout simplement pas cela arriver avec la route qu’il nous propose. Et cela, c’est sans parler de tout le pan de l’éducation postsecondaire qui risque d’être laissé pour compte et de dépérir au fil des quatre à cinq prochaines années. Tous les domaines des sciences humaines, des sciences sociales, des arts… quel genre de réflexion poseront-nous sur notre société si on y dévalorise les travailleurs de l’esprit?
Mais voilà, la stratégie est lancée. Les collèges communautaires de la province renippent leur image en prévision de l’afflux de nouveaux étudiants (CapAcadie) et il existe même un groupe étudiant provincial pour apporter son soutien à la stratégie obscurantiste (on troque l’éducation pour la formation, ventrebleu!) du gouvernement Alward. Le 27 août, l’AÉNB a publiquement applaudi l’initiative sur son site web (AÉNB). Venant d’un organisme ne représente que les étudiants –et pas tous je vous l’assure!- du créneau universitaire, cela a quelque chose de surprenant.
Il demeure que, peu importe les incohérences qui parsèment tout ce dossier, le discours qui l’accompagne est symptomatique de quelque chose de beaucoup plus grave qu’une stratégie bâclée; c’est l’asservissement progressif de l’éducation postsecondaire (ainsi que primaire et secondaire, éventuellement) aux besoins, mêmes imaginaires, du marché.
L’éducation postsecondaire devient, plus que jamais, un produit. Ce que les institutions cherchent à vendre promouvoir à leurs clients étudiants prospectifs, c ‘est la garantie d’une éducation qui leur donne accès à un emploi –de préférence bien rémunéré- en bout de parcours.
Ce qu’on cherche à vendre aux Canadiens, avec des articles comme celui-ci par exemple (CBC), qui deviennent de plus en plus fréquents, c’est que le problème, à la base, c’est pas que l’éducation postsecondaire soit trop dispendieuse, mais que les étudiant(e)s ne choisissent pas des domaines qui leur garantisse un emploi bien rémunéré.
En nous montrant des exemples pathétiques d’étudiants qui occupent des emplois pour lesquels ils sont surqualifiés, et en nous rabâchant les oreilles avec les domaines d’études offrant le meilleur retour sur l’investissement, assortis de statistiques déprimantes sur l’état de l’emploi chez les nouveaux diplômés (le tout est fondé sur un rapport récent de la CIBC) on tâche de convaincre la jeunesse canadienne que ce n’est pas tant ce qu’ils veulent faire de leur vie qui compte, ni l’impact qu’ils veulent avoir sur le monde qui les entoure et leur communauté, non; ce qui compte c’est combien cela leur rapportera.
Au Canada, c’est de la formation qu’on veut, plus de l’éducation. Pire encore, on tente de vous vendre cette salade en vous disant que c’est pour votre bien, que vous devriez choisir votre domaine d’études selon les besoins du marché et la possibilité de retour sur votre investissement. Pas selon vos intérêts, votre passion ou vos forces.
On cherche à faire des étudiants qui ne seront non plus des individus aptes à transformer le marché, mais des éléments préfabriqués qui s’y insèreront sans accrochages, pour perpétuer le mouvement de la machine tel qu’il existe et doit continuer à exister.
Le postsecondaire transfiguré en manufacture. Ce serait trop triste.
Heureusement, s’il y a une chose que les statistiques de la CIBC peuvent nous démontrer qui soit utile, c’est que la stratégie ne fonctionne qu’à moitié.
Il y a encore, heureusement, des gens qui sont capables de valoriser l’éducation pour ce qu’elle apporte à l’individu, non pas uniquement d’un point de vue financier, mais d’un point de vue personnel, formatif et évolutif. Pour ce qu’elle permet d’apprendre sur soi-même, sur l’impact qu’elle a sur le développement de la personne et de la pensée, sur la possibilité d’avoir des diplômés oeuvrant avec conviction dans un domaine qui les passionne. Et si c’est la tuyauterie ou la soudure, tant mieux!
Il semblerait qu’on doive s’attendre à une rentrée sur le thème de l’éducation au service des besoins «criants» du marché du travail. La pénurie de main-d’œuvre qualifiée (le «skills gap» ou «skill shortage») ressort de plus en plus dans les discours politiques et économiques sur l’avenir de l’éducation, comme de la nation canadienne. Et ce, tant sur la scène fédérale que provinciale.
Au N-B, le gouvernement Alward a lancé cette semaine sa «stratégie de perfectionnement des compétences», visant à combler l’écart entre les besoins du marché et le nombre de diplômés dans les programmes susceptibles de contribuer à combler cet écart à courte échéance (Radio-Canada). On entrevoit, par exemple, des besoins grandissants en soudure ou en tuyauterie industrielle avec le développement du projet d’oléoduc de la compagnie TransCanada. Il faut, selon le gouvernement Alward et le ministre de l’éducation, de la formation et du travail, Danny Soucy, encourager les jeunes à s’éduquer dans ces domaines.
Il y a un problème majeur à considérer en ces termes la contribution de l’éducation postsecondaire à la société : comme l’a souligné l’article de David Caron ce matin dans l’Acadie Nouvelle (CapAcadie), il y a une différence entre former de la main-d’œuvre et éduquer de futurs citoyens. Cette différence, le gouvernement Alward ne semble pas la saisir, si l’on en juge par l’annonce faite plus tôt cette semaine.
D’entrée de jeu, sa stratégie de perfectionnement des compétences de la main-d’œuvre du Nouveau-Brunswick se limite à la période 2013-2016. On peut difficilement la qualifier de visionnaire. Ensuite, sa philosophie : «s’assurer que les Néo-Brunswickois possèdent les compétences nécessaires pour tirer profit des nouveaux débouchés», laisse entendre que les compétences en question ne vont pas bien au-delà de celles requises dans la construction d’un oléoduc.
L’oléoduc TransCanada, on en a déjà parlé en long et en large, inutile d’y revenir. Cependant, il y a une masse de facteurs qui doivent entrer en jeu si la stratégie du gouvernement Alward doit porter fruit : les nouveaux diplômés doivent être aptes à intégrer la force ouvrière début 2015, quand le début de la construction est prévu; TransCanada doit être ouverte à l’embauche de travailleurs nouvellement formés et inexpérimentés; elle doit aussi être disposée à embaucher de la main-d’œuvre locale, c’est-à-dire de ne pas puiser à même ses ressources humaines actuelles les spécialistes dont elle a besoin pour s’assurer d’une construction efficace, rapide (donc : économique) et sécuritaire.
TransCanada doit également être disposée à investir des sommes importantes dans la formation continue de ces nouveaux employés, de même qu’à accepter les délais engendrés par la période d’apprentissage sur le site de travail, la réparation des erreurs inévitables des travailleurs encore «verts», des accidents de travail dont le risque est plus élevé avec des travailleurs non-expérimentés, etc.
Et après tout cela, il faut encore que les emplois créés se poursuivent au-delà de la période de construction de l’oléoduc qui, comme on le sait, génère peu d’emplois à long terme en tant qu’infrastructure passive.
Ce sont les principaux obstacles à la stratégie du gouvernement, à première vue. Il faut admettre qu’il ne s’agit ici que de réflexions fondées sur le gros bon sens, et que nous n’avons pas devant nous les détails spécifiques de l’entente de construction (ou d’opération) de l’éventuelle infrastructure –si un tel document existe. Et espérons que oui parce que sinon, on va se retrouver avec un paquet de Néo-Brunswickois éduqués ici et qui doivent aller prêter leur expertise à des compagnies ailleurs au Canada ou en-dehors du pays. Un peu comme maintenant.
Et la stratégie (GNB) ne se limite pas au postsecondaire : dès la 9e année, le gouvernement compte informer les élèves «des secteurs prioritaires de croissance pouvant mener à un emploi éventuel, et des exigences d’études postsecondaires».
Problème à l’horizon : il faut que ces prévisions tiennent la route pour un minimum de trois à cinq, au cours desquels des individus déjà en formation auront eu le temps de combler au moins en partie les besoins du marché. Autre problème, une partie de la stratégie vise l’attraction et la rétention d’immigrants hautement qualifiés, qui vont venir combler à leur tour une part des positions supposément vacantes.
Quand on propose de former «des diplômés qui arrivent sur le marché du travail […] prêts à effectuer les tâches pour lesquelles ils ont été formés [et qui] doivent pouvoir répondre aux besoins actuels du marché et […] aider nos entreprises et notre secteur public à faire preuve d’innovation», on prétend pouvoir prédire les besoins futurs du marché, ce qui tient de l’aberration.
L’économiste Dan Drummond discrédite d’ailleurs la rhétorique conservatrice (fédérale) sur la pénurie de main-d’œuvre qualifiée (Toronto Star), qu’il juge dépourvue de toute évidence crédible. Ses arguments? Statistique Canada compte 6.3 ouvriers pour chaque position vacante au pays : cela suggère en effet un surplus de travailleurs et non une pénurie au plan des qualifications. Il rajoute qu’il n’existe pas de hausse marquée des salaires dans les domaines hautement spécialisés : si le manque était si criant, les compagnies s’arracheraient le «peu» de main-d’oeuvre qualifiée à prix d’or. Drummond fait aussi valoir qu’Ottawa est tout bonnement incapable de prévoir avec précision les besoin du marché de l’emploi car ses méthodes sont biaisées et ses sources peu fiables.
L’économiste estime possible, à ce stade, que la Subvention canadienne pour l’emploi, pièce maîtresse du plan d’action économique du gouvernement Harper, soit fondée sur une fausse prémisse. Ce ne serait pas une première pour les Conservateurs, qui ont augmenté les mesures de sécurité en raison d’une hausse des «crimes non-rapportés», alors que le taux de criminalité au pays était en baisse, aboli le formulaire long du recensement parce qu’il avait reçu la plainte de 10 000 citoyens disant qu’il constituait une violation de la vie privée alors que seulement 27 plaintes ont été enregistrées, et entraîné le pays dans le fiasco des F-35 en affirmant qu’il était le seul avion répondant aux besoins militaires du Canada, ce qui était -au mieux- une affirmation discutable.
Alors voilà, la stratégie du gouvernement Alward, en prônant un système d’éducation au service de l’industrie (en favorisant les programmes STEM (Sciences, Technologies, Génie et Mathématiques) ne semble pas innover durablement en fait d’éducation, en misant sur le court terme. S’il y a quelque chose que ce gouvernement nous a prouvé au fil de son mandat, c’est qu’il est plutôt tiède à l’idée de faire de grandes dépenses en fait d’infrastructures, et que les compagnies de l’extérieur ne font certainement pas pied-de-grue devant notre porte pour le faire à sa place.
Le but du gouvernement doit être en partie de retenir ici les gens formés ici. Je ne vois tout simplement pas cela arriver avec la route qu’il nous propose. Et cela, c’est sans parler de tout le pan de l’éducation postsecondaire qui risque d’être laissé pour compte et de dépérir au fil des quatre à cinq prochaines années. Tous les domaines des sciences humaines, des sciences sociales, des arts… quel genre de réflexion poseront-nous sur notre société si on y dévalorise les travailleurs de l’esprit?
Mais voilà, la stratégie est lancée. Les collèges communautaires de la province renippent leur image en prévision de l’afflux de nouveaux étudiants (CapAcadie) et il existe même un groupe étudiant provincial pour apporter son soutien à la stratégie obscurantiste (on troque l’éducation pour la formation, ventrebleu!) du gouvernement Alward. Le 27 août, l’AÉNB a publiquement applaudi l’initiative sur son site web (AÉNB). Venant d’un organisme ne représente que les étudiants –et pas tous je vous l’assure!- du créneau universitaire, cela a quelque chose de surprenant.
Il demeure que, peu importe les incohérences qui parsèment tout ce dossier, le discours qui l’accompagne est symptomatique de quelque chose de beaucoup plus grave qu’une stratégie bâclée; c’est l’asservissement progressif de l’éducation postsecondaire (ainsi que primaire et secondaire, éventuellement) aux besoins, mêmes imaginaires, du marché.
L’éducation postsecondaire devient, plus que jamais, un produit. Ce que les institutions cherchent à vendre promouvoir à leurs clients étudiants prospectifs, c ‘est la garantie d’une éducation qui leur donne accès à un emploi –de préférence bien rémunéré- en bout de parcours.
Ce qu’on cherche à vendre aux Canadiens, avec des articles comme celui-ci par exemple (CBC), qui deviennent de plus en plus fréquents, c’est que le problème, à la base, c’est pas que l’éducation postsecondaire soit trop dispendieuse, mais que les étudiant(e)s ne choisissent pas des domaines qui leur garantisse un emploi bien rémunéré.
En nous montrant des exemples pathétiques d’étudiants qui occupent des emplois pour lesquels ils sont surqualifiés, et en nous rabâchant les oreilles avec les domaines d’études offrant le meilleur retour sur l’investissement, assortis de statistiques déprimantes sur l’état de l’emploi chez les nouveaux diplômés (le tout est fondé sur un rapport récent de la CIBC) on tâche de convaincre la jeunesse canadienne que ce n’est pas tant ce qu’ils veulent faire de leur vie qui compte, ni l’impact qu’ils veulent avoir sur le monde qui les entoure et leur communauté, non; ce qui compte c’est combien cela leur rapportera.
Au Canada, c’est de la formation qu’on veut, plus de l’éducation. Pire encore, on tente de vous vendre cette salade en vous disant que c’est pour votre bien, que vous devriez choisir votre domaine d’études selon les besoins du marché et la possibilité de retour sur votre investissement. Pas selon vos intérêts, votre passion ou vos forces.
On cherche à faire des étudiants qui ne seront non plus des individus aptes à transformer le marché, mais des éléments préfabriqués qui s’y insèreront sans accrochages, pour perpétuer le mouvement de la machine tel qu’il existe et doit continuer à exister.
Le postsecondaire transfiguré en manufacture. Ce serait trop triste.
Heureusement, s’il y a une chose que les statistiques de la CIBC peuvent nous démontrer qui soit utile, c’est que la stratégie ne fonctionne qu’à moitié.
Il y a encore, heureusement, des gens qui sont capables de valoriser l’éducation pour ce qu’elle apporte à l’individu, non pas uniquement d’un point de vue financier, mais d’un point de vue personnel, formatif et évolutif. Pour ce qu’elle permet d’apprendre sur soi-même, sur l’impact qu’elle a sur le développement de la personne et de la pensée, sur la possibilité d’avoir des diplômés oeuvrant avec conviction dans un domaine qui les passionne. Et si c’est la tuyauterie ou la soudure, tant mieux!
vendredi 23 août 2013
Camp de formation étudiant (Ouvert à tous!)
Pour bien lancer l'année, la FÉÉCUM se donne à deux jours d'ateliers et d'activités pour les étudiant.e.s qui veulent, ou songe à, s'engager. C'est ouvert à tous (il ne fallait réserver que pour le souper), donc si un atelier ou l'autre vous intéresse, ou pourrait profiter à votre association ou groupe étudiant, ou votre formation personnelle, n'hésitez pas à nous joindre temporairement ou complètement! Voici l'horaire :
Dimanche 25 août
12h30 — Arrivée des participants au Coude
13h — Le mouvement étudiant à l’Université de Moncton (Raymond Blanchard)
14h15 — Éducation : Projet de société (Kevin Arseneau)
15h30 — Panel de discussion : La boite à outil d’un militant
17h30 — Souper (L’importance des médias dans le mouvement étudiant avec Antony Doiron)
19h – Activité ludique
20h – Activité socio-culturelle (Sylvie Poirier et Cyril Kerboul)
21h — Soirée musicale au Coude
Lundi 26 août
12h30 — Arrivée des participants à la FÉÉCUM
13h — Discussion — Bâtir le pouvoir étudiant (Simon Ouellette)
14h15 [Choix]
a) Représentation étudiante au niveau académique (Samuel LeBlanc)
b) Imputabilité Financière (Pierre Losier)
c) La démocratie à la base (Émilie Haché)
d) L’incontournable politique dans le mouvement étudiant (Kevin Arseneau)
15h15 – L'ABC d'une réunion (Alexandre Levasseur)
16h00 — Une réunion du conseil d'administration de la FÉÉCUM (ordre du jour à suivre par courriel étudiant)
En espérant que vous penserez à répondre à notre invitation, au plaisir de vous y rencontrer!
Dimanche 25 août
12h30 — Arrivée des participants au Coude
13h — Le mouvement étudiant à l’Université de Moncton (Raymond Blanchard)
14h15 — Éducation : Projet de société (Kevin Arseneau)
15h30 — Panel de discussion : La boite à outil d’un militant
17h30 — Souper (L’importance des médias dans le mouvement étudiant avec Antony Doiron)
19h – Activité ludique
20h – Activité socio-culturelle (Sylvie Poirier et Cyril Kerboul)
21h — Soirée musicale au Coude
Lundi 26 août
12h30 — Arrivée des participants à la FÉÉCUM
13h — Discussion — Bâtir le pouvoir étudiant (Simon Ouellette)
14h15 [Choix]
a) Représentation étudiante au niveau académique (Samuel LeBlanc)
b) Imputabilité Financière (Pierre Losier)
c) La démocratie à la base (Émilie Haché)
d) L’incontournable politique dans le mouvement étudiant (Kevin Arseneau)
15h15 – L'ABC d'une réunion (Alexandre Levasseur)
16h00 — Une réunion du conseil d'administration de la FÉÉCUM (ordre du jour à suivre par courriel étudiant)
En espérant que vous penserez à répondre à notre invitation, au plaisir de vous y rencontrer!
vendredi 9 août 2013
Projet Énergie Est de TransCanada : 3) l’aspect social
par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
On en vient enfin à l’impact qu’aura le projet Énergie Est sur la société néo-brunswickoise. D’entrée de jeu, les gains projetés pour l’ensemble de la population sont liés au réinvestissement des revenus supplémentaires acquis sous forme de redevances, ainsi qu’à la création d’emplois (surtout dans la région de Saint-Jean).
Il ne faut certes pas négliger l’importance de l’injection prévue de fonds dans l’économie du N-B, au sujet de laquelle le premier ministre Alward a déclaré :
«Ensemble, nous saisissons une opportunité sans précédent de créer des emplois pour nos travailleurs, d’établir des bases plus solides pour l’économie de nos communautés, et de financer l’éducation, les soins de santé et les programmes sociaux que les familles méritent (traduction libre)» (CBC)
Certes, il existe la possibilité de créer quelques 2000 emplois durant la construction de l’oléoduc, soit pour une période de 18 à 24 mois : Alward se réjouit de pouvoir rapatrier nos travailleurs et citoyens exilés… pour deux ans. Il ouvre d’ailleurs sa récente (et controversée) pub télé partisane diffusée aux frais des contribuables avec cette affirmation (CBC à 0 :30).
Tout au plus, l’augmentation de l’approvisionnement à la raffinerie Irving de Saint-Jean et l’agrandissement projeté de ses infrastructures pourrait créer «quelques centaines» d’emplois par la suite. Alward a déclaré à la CBC qu’il souhaitait obtenir un maximum de plus-value pour le N-B sur le brut transporté par l’oléoduc : y aura-t-il (peut-il y avoir?) des mesures concrètes prises en ce sens? On verra.
L’oléoduc tel que projeté aura une capacité de 1,1 millions de barils par jour; à l’heure actuelle, le Québec en importe 400 000, et le Nouveau-Brunswick, 700 000. Sauf qu’il y a également d’autres terminaux et raffineries le long du tracé et que Saint-Jean se trouve tout au bout de la ligne. Ne va-t-on ramasser que des miettes?
Tiens, parlons-en du tracé : la seconde étape du projet Énergie Est (après l’approbation du Conseil de l’énergie du Canada) est de tenir des consultations publiques pour établir l’emplacement de l’oléoduc. Précisons que TransCanada n’a pas l’intention d’acheter les terres où passeront ses canalisations, préférant négocier des droits de passage (Radio-Canada). Cela suscite des inquiétudes quant à la responsabilité en cas de déversement ou de bris de l’équipement : le site web de la compagnie se veut toutefois rassurant à cet égard.
Il y a fort à parier qu’il sera à l’avantage des propriétaires de s’improviser inspecteurs sur leur bout du tuyau!
Des terrains agricoles et forestiers (pour la majorité) seront coupés en deux par l’oléoduc, ce pour quoi les propriétaires souhaitent être indemnisés, du moins au Québec. Il faudra pousser mais pousser égal, car en 2005 Ultramar a obtenu par le biais de la législation québécoise le droit d’exproprier sur les terres où doit passer l’oléoduc Saint-Laurent, créant un précédent dans la province (Radio-Canada). Pas de législation du genre ici pour l’instant; de toute manière le tracé suggéré passe majoritairement sur les terres de la Couronne. Au N-B, les inquiétudes ont surtout été formulées à l’égard de la protection des réserves d’eau potable.
À cette étape du projet, l’oléoduc pourrait longer les lignes à haute tension d’Hydro-Québec, puis celles d’Énergie N-B. Ce tracé placerait l’oléoduc à environ 2km de la source d’eau de la municipalité d’Edmundston; le maire Cyrille Simard a déjà souligné ce problème aux responsables. Jusqu’ici, rien de majeur, rien que ce bémol. Toute la région du bassin-versant du fleuve Saint-Jean sera cependant vulnérable en cas de déversement (Radio-Canada).
Dans une région (et j’utilise le terme au sens large en raison des courants marins) où la pêche et l’aquaculture constituent un secteur important de l’économie, tout déversement de pétrole dans la Baie de Fundy pourrait avoir des conséquences désastreuses. Les fortes marées de la Baie de Fundy accélèreraient la dispersion du pétrole dans les eaux et rivières avoisinantes (Fundy Tides). Imaginez un déversement sur le mode «turbo BP»; c’est pas du joli…
Conséquences écologiques, ainsi qu’économiques, certes, mais également sociales : le mode de vie, la mentalité caractéristique à la région de l’Atlantique repose en large partie sur la relation avec la mer. Comme celle de la côte louisianaise, et on sait combien la catastrophe de 2010 a affecté cette région (Google).
Sans la mer, l’Atlantique serait quoi? Comment se définirait-on? Et avec une rivière espresso plutôt que chocolat, qu’adviendrait-il de Moncton?
…
Mais revenons à la création d’emplois, qui est toujours le fer de lance des Conservateurs dans la promotion de projets. Barack Obama a récemment rejeté un autre projet d’envergure lié aux sables bitumineux albertains, le pipeline Keystone XL, sur la base qu’une fois construit l’oléoduc ne créerait que 50 à 100 emplois (CBC). S’ajoutent d’autres considérations environnementales, au nombre desquelles les quantités massives de GES émises par les pétrolières exploitant la ressource (CBC). Mais si Keystone XL représente –à long terme- 50 à 100 emplois pour un pipeline de 2700 km, qu’en sera-t-il de l’oléoduc proposé au N-B, qui ne représente, au mieux, qu’un peu plus de 500 km?
Les emplois à long terme créés par le projet seront presque entièrement à la raffinerie de Saint-Jean. C’est donc la région de Saint-Jean qui va en tirer le plus grand bénéfice. Le premier ministre Alward voit déjà le N-B comme «le prochain centre énergétique de l’Amérique du Nord (pense-t-il au gaz de schiste?) et Saint-Jean, son point d’ancrage» (Radio-Canada). Il faut demeurer réalistes, selon la maire d’Edmundston Cyrille Simard : malgré l’annonce de nombreux emplois durant la construction, les oléoducs ne sont pas des infrastructures qui créent beaucoup d’emplois à longue échéance. Pour le reste de la province, Alward laisse entendre qu’il a l’intention de mieux financer l’éducation, le système de santé et les programmes sociaux…
Le reste de la province, qui sera vraisemblablement laissé derrière dans tout cet élan économique, ne doit s’attendre qu’à de meilleures mesures de réduction de la pauvreté et, si la chance est de notre côté, des améliorations en santé et en éducation. Mais vu la récente tendance à l’austérité et aux compressions dans ces deux secteurs des investissements majeurs seraient non seulement étonnants, mais régressifs en raison des nombreux remaniements déjà effectués ou planifiés. Et quant à rapatrier nos travailleurs, pour l’avoir fait moi-même pendant une année, Saint-Jean, ça reste un exil.
Dans les faits, on risque surtout d’augmenter l’inégalité socioéconomique entre le Nord et le Sud de la province. Même le nord-ouest, par où passera l’oléoduc, ne doit pas s’attendre à de grandes retombées, ou du moins pas directes. Au mieux, c’est-à-dire si les emplois sont en quantités suffisantes –à long terme- les régions se vident pour aller travailler dans le Sud-Ouest, au lieu de L’Ouest tout court.
Alward semble placer l’éducation en tête de liste des secteurs à mieux financer –ce qui est logique car présentement le statu quo (sans indexation) au niveau du financement équivaut à des baisses du financement- mais il reste à savoir ce qu’il a en tête. Premièrement, il y a un clair besoin au niveau des garderies, comme dans le secteur de l’enseignement ressource et des assistant(e)s en éducation. Et nous avons déjà longuement discuté des investissements qui s’imposent au niveau postsecondaire, et sans doute en parlerons-nous encore.
Terre-Neuve, par exemple, utilise une partie des redevances pétrolières pour financer l’éducation postsecondaire. Les droits de scolarité y sont gelés depuis 2005 à leur niveau de 1997 : 2550$ par année.
Si on regarde l’effet qu’ont eu les revenus des sables bitumineux en Alberta, on constate à quel point l’afflux de fonds a permis à la province d’accumuler des richesses : des redevances de 3,7 milliards$ en 2010-2011, et des sommes projetées de 350 milliards$ en redevances, à quoi s’ajoute 122 milliards$ en revenus de taxation au cours des prochains 25 ans (Alberta Oil Sands). Ces revenus contribuent à financer plusieurs services publics dans la province (qui reste par ailleurs vague sur ces chiffres). On comprend aussi pourquoi la province est si enthousiaste à l’idée d’accéder aux marchés mondiaux, ce qui permettrait de gonfler le prix du baril de brut albertain.
De plus, le secteur pétrolier emploie 151 000 personnes en Alberta, dont une forte quantité d’Autochtones. Les sables bitumineux à eux seuls comptent la moitié de ces emplois, et il est prévu que leur nombre atteigne 905 000 (dont 126 000 en-dehors de l’Alberta) en 2035… Difficile de croire que l’exode de nos populations vers l’Ouest va cesser avec l’arrivée de l’oléoduc, je dirais. Pas au rythme auquel augmente la population canadienne en tout cas. En Alberta, aucun doute, le projet Énergie Est n’a pas été difficile à vendre!
Et, parlant d’Autochtones, les Premières nations s’opposent généralement aux projets de ce genre. L’exploitation et le transport des ressources naturelles menacent souvent des terres ancestrales liées à la chasse et la pêche, deux activités de subsistance qui sont garanties aux Autochtones par les Traités. Et, devons-nous l’ajouter, de moins en moins de lois fédérales protègent l’environnement (et particulièrement l’eau) quand il est question d’exploiter les ressources naturelles tirées du sol canadien. Les Traités sont le dernier rempart face à l’industrie.
Les premières nations du N-B s’attendent d’ailleurs à ce que leurs conditions soient remplies avant que le projet Énergie Est puisse aller de l’avant (CBC). Dans la conjoncture actuelle, issue du mouvement «Idle No More» de l’an dernier -au terme duquel les Autochtones se sont heurtés au silence d’Ottawa quand ils ont revendiqué de meilleures conditions de vie pour les leurs- on est en droit de s’attendre à de nombreuses disputes et manifestations avant l’établissement du tracé final. Pas besoin d’aller à Ottawa pour jauger le mécontentement des Autochtones : allez seulement faire un tour du côté d’Elsipogtog (Route 126), où la résistance est forte contre l’exploitation du gaz de schiste (Radio-Canada).
Il faut cependant reconnaître que la ressource (en Alberta comme ici) est là, qu’elle a de la valeur, et qu’il y a certainement un incitatif (c’est-à-dire pas seulement un bénéfice pour le secteur privé) à l’exploiter. Par contre –et c’est là que le raisonnement de groupes comme Équiterre sonne juste- les réserves totales de pétrole albertain, bien que massives, ne sont pas éternelles. Or, si la ressource ne peut que diminuer, pourquoi le gouvernement fédéral tarde-t-il à établir une stratégie énergétique fortement axée sur le développement des énergies renouvelables (tu veux parler d’innovation? ben quin!), tout en gérant l’exploitation sécuritaire et (éco)responsable des ressources naturelles qui font la richesse de ce pays.
Et côté gaz de schiste, rien ne prouve que les ressources soient suffisantes pour justifier les coûts (et les risques) liés à l’extraction. Les avis diffèrent certes sur les quantités exploitables, et il y a lieu de douter que ce soit Craig Leonard (ministre de l’Énergie) qui ait les données justes (Radio-Canada).
Bref, une dernière question persiste, à laquelle il n’y aura réponse qu’après la mise en opération de l’oléoduc, en 2018, et l’éventuelle développement –ou non- d’une industrie du schiste : combien?
La réponse, on la devine facilement car c’est toujours la même : moins qu’on pense. MAIS : est-ce tout de même mieux que rien? Et à quel prix, à quel impact sur notre environnement et les vies de nos citoyens? Faire un pas de l’avant pour en prendre deux de l’arrière, c’est malheureusement une tendance quasi-historique au N-B : pensons à long terme.
Targuez-moi de pessimisme, mais je lis, j’écoute, et tout ça me semble trop beau pour être vrai. Des profits au privé ET des investissements en éducation, en santé et dans les programmes sociaux? Et subitement Irving va payer la note?
Hmmm.
On en vient enfin à l’impact qu’aura le projet Énergie Est sur la société néo-brunswickoise. D’entrée de jeu, les gains projetés pour l’ensemble de la population sont liés au réinvestissement des revenus supplémentaires acquis sous forme de redevances, ainsi qu’à la création d’emplois (surtout dans la région de Saint-Jean).
Il ne faut certes pas négliger l’importance de l’injection prévue de fonds dans l’économie du N-B, au sujet de laquelle le premier ministre Alward a déclaré :
«Ensemble, nous saisissons une opportunité sans précédent de créer des emplois pour nos travailleurs, d’établir des bases plus solides pour l’économie de nos communautés, et de financer l’éducation, les soins de santé et les programmes sociaux que les familles méritent (traduction libre)» (CBC)
Certes, il existe la possibilité de créer quelques 2000 emplois durant la construction de l’oléoduc, soit pour une période de 18 à 24 mois : Alward se réjouit de pouvoir rapatrier nos travailleurs et citoyens exilés… pour deux ans. Il ouvre d’ailleurs sa récente (et controversée) pub télé partisane diffusée aux frais des contribuables avec cette affirmation (CBC à 0 :30).
Tout au plus, l’augmentation de l’approvisionnement à la raffinerie Irving de Saint-Jean et l’agrandissement projeté de ses infrastructures pourrait créer «quelques centaines» d’emplois par la suite. Alward a déclaré à la CBC qu’il souhaitait obtenir un maximum de plus-value pour le N-B sur le brut transporté par l’oléoduc : y aura-t-il (peut-il y avoir?) des mesures concrètes prises en ce sens? On verra.
L’oléoduc tel que projeté aura une capacité de 1,1 millions de barils par jour; à l’heure actuelle, le Québec en importe 400 000, et le Nouveau-Brunswick, 700 000. Sauf qu’il y a également d’autres terminaux et raffineries le long du tracé et que Saint-Jean se trouve tout au bout de la ligne. Ne va-t-on ramasser que des miettes?
Tiens, parlons-en du tracé : la seconde étape du projet Énergie Est (après l’approbation du Conseil de l’énergie du Canada) est de tenir des consultations publiques pour établir l’emplacement de l’oléoduc. Précisons que TransCanada n’a pas l’intention d’acheter les terres où passeront ses canalisations, préférant négocier des droits de passage (Radio-Canada). Cela suscite des inquiétudes quant à la responsabilité en cas de déversement ou de bris de l’équipement : le site web de la compagnie se veut toutefois rassurant à cet égard.
Il y a fort à parier qu’il sera à l’avantage des propriétaires de s’improviser inspecteurs sur leur bout du tuyau!
Des terrains agricoles et forestiers (pour la majorité) seront coupés en deux par l’oléoduc, ce pour quoi les propriétaires souhaitent être indemnisés, du moins au Québec. Il faudra pousser mais pousser égal, car en 2005 Ultramar a obtenu par le biais de la législation québécoise le droit d’exproprier sur les terres où doit passer l’oléoduc Saint-Laurent, créant un précédent dans la province (Radio-Canada). Pas de législation du genre ici pour l’instant; de toute manière le tracé suggéré passe majoritairement sur les terres de la Couronne. Au N-B, les inquiétudes ont surtout été formulées à l’égard de la protection des réserves d’eau potable.
À cette étape du projet, l’oléoduc pourrait longer les lignes à haute tension d’Hydro-Québec, puis celles d’Énergie N-B. Ce tracé placerait l’oléoduc à environ 2km de la source d’eau de la municipalité d’Edmundston; le maire Cyrille Simard a déjà souligné ce problème aux responsables. Jusqu’ici, rien de majeur, rien que ce bémol. Toute la région du bassin-versant du fleuve Saint-Jean sera cependant vulnérable en cas de déversement (Radio-Canada).
Dans une région (et j’utilise le terme au sens large en raison des courants marins) où la pêche et l’aquaculture constituent un secteur important de l’économie, tout déversement de pétrole dans la Baie de Fundy pourrait avoir des conséquences désastreuses. Les fortes marées de la Baie de Fundy accélèreraient la dispersion du pétrole dans les eaux et rivières avoisinantes (Fundy Tides). Imaginez un déversement sur le mode «turbo BP»; c’est pas du joli…
Conséquences écologiques, ainsi qu’économiques, certes, mais également sociales : le mode de vie, la mentalité caractéristique à la région de l’Atlantique repose en large partie sur la relation avec la mer. Comme celle de la côte louisianaise, et on sait combien la catastrophe de 2010 a affecté cette région (Google).
Sans la mer, l’Atlantique serait quoi? Comment se définirait-on? Et avec une rivière espresso plutôt que chocolat, qu’adviendrait-il de Moncton?
…
Mais revenons à la création d’emplois, qui est toujours le fer de lance des Conservateurs dans la promotion de projets. Barack Obama a récemment rejeté un autre projet d’envergure lié aux sables bitumineux albertains, le pipeline Keystone XL, sur la base qu’une fois construit l’oléoduc ne créerait que 50 à 100 emplois (CBC). S’ajoutent d’autres considérations environnementales, au nombre desquelles les quantités massives de GES émises par les pétrolières exploitant la ressource (CBC). Mais si Keystone XL représente –à long terme- 50 à 100 emplois pour un pipeline de 2700 km, qu’en sera-t-il de l’oléoduc proposé au N-B, qui ne représente, au mieux, qu’un peu plus de 500 km?
Les emplois à long terme créés par le projet seront presque entièrement à la raffinerie de Saint-Jean. C’est donc la région de Saint-Jean qui va en tirer le plus grand bénéfice. Le premier ministre Alward voit déjà le N-B comme «le prochain centre énergétique de l’Amérique du Nord (pense-t-il au gaz de schiste?) et Saint-Jean, son point d’ancrage» (Radio-Canada). Il faut demeurer réalistes, selon la maire d’Edmundston Cyrille Simard : malgré l’annonce de nombreux emplois durant la construction, les oléoducs ne sont pas des infrastructures qui créent beaucoup d’emplois à longue échéance. Pour le reste de la province, Alward laisse entendre qu’il a l’intention de mieux financer l’éducation, le système de santé et les programmes sociaux…
Le reste de la province, qui sera vraisemblablement laissé derrière dans tout cet élan économique, ne doit s’attendre qu’à de meilleures mesures de réduction de la pauvreté et, si la chance est de notre côté, des améliorations en santé et en éducation. Mais vu la récente tendance à l’austérité et aux compressions dans ces deux secteurs des investissements majeurs seraient non seulement étonnants, mais régressifs en raison des nombreux remaniements déjà effectués ou planifiés. Et quant à rapatrier nos travailleurs, pour l’avoir fait moi-même pendant une année, Saint-Jean, ça reste un exil.
Dans les faits, on risque surtout d’augmenter l’inégalité socioéconomique entre le Nord et le Sud de la province. Même le nord-ouest, par où passera l’oléoduc, ne doit pas s’attendre à de grandes retombées, ou du moins pas directes. Au mieux, c’est-à-dire si les emplois sont en quantités suffisantes –à long terme- les régions se vident pour aller travailler dans le Sud-Ouest, au lieu de L’Ouest tout court.
Alward semble placer l’éducation en tête de liste des secteurs à mieux financer –ce qui est logique car présentement le statu quo (sans indexation) au niveau du financement équivaut à des baisses du financement- mais il reste à savoir ce qu’il a en tête. Premièrement, il y a un clair besoin au niveau des garderies, comme dans le secteur de l’enseignement ressource et des assistant(e)s en éducation. Et nous avons déjà longuement discuté des investissements qui s’imposent au niveau postsecondaire, et sans doute en parlerons-nous encore.
Terre-Neuve, par exemple, utilise une partie des redevances pétrolières pour financer l’éducation postsecondaire. Les droits de scolarité y sont gelés depuis 2005 à leur niveau de 1997 : 2550$ par année.
Si on regarde l’effet qu’ont eu les revenus des sables bitumineux en Alberta, on constate à quel point l’afflux de fonds a permis à la province d’accumuler des richesses : des redevances de 3,7 milliards$ en 2010-2011, et des sommes projetées de 350 milliards$ en redevances, à quoi s’ajoute 122 milliards$ en revenus de taxation au cours des prochains 25 ans (Alberta Oil Sands). Ces revenus contribuent à financer plusieurs services publics dans la province (qui reste par ailleurs vague sur ces chiffres). On comprend aussi pourquoi la province est si enthousiaste à l’idée d’accéder aux marchés mondiaux, ce qui permettrait de gonfler le prix du baril de brut albertain.
De plus, le secteur pétrolier emploie 151 000 personnes en Alberta, dont une forte quantité d’Autochtones. Les sables bitumineux à eux seuls comptent la moitié de ces emplois, et il est prévu que leur nombre atteigne 905 000 (dont 126 000 en-dehors de l’Alberta) en 2035… Difficile de croire que l’exode de nos populations vers l’Ouest va cesser avec l’arrivée de l’oléoduc, je dirais. Pas au rythme auquel augmente la population canadienne en tout cas. En Alberta, aucun doute, le projet Énergie Est n’a pas été difficile à vendre!
Et, parlant d’Autochtones, les Premières nations s’opposent généralement aux projets de ce genre. L’exploitation et le transport des ressources naturelles menacent souvent des terres ancestrales liées à la chasse et la pêche, deux activités de subsistance qui sont garanties aux Autochtones par les Traités. Et, devons-nous l’ajouter, de moins en moins de lois fédérales protègent l’environnement (et particulièrement l’eau) quand il est question d’exploiter les ressources naturelles tirées du sol canadien. Les Traités sont le dernier rempart face à l’industrie.
Les premières nations du N-B s’attendent d’ailleurs à ce que leurs conditions soient remplies avant que le projet Énergie Est puisse aller de l’avant (CBC). Dans la conjoncture actuelle, issue du mouvement «Idle No More» de l’an dernier -au terme duquel les Autochtones se sont heurtés au silence d’Ottawa quand ils ont revendiqué de meilleures conditions de vie pour les leurs- on est en droit de s’attendre à de nombreuses disputes et manifestations avant l’établissement du tracé final. Pas besoin d’aller à Ottawa pour jauger le mécontentement des Autochtones : allez seulement faire un tour du côté d’Elsipogtog (Route 126), où la résistance est forte contre l’exploitation du gaz de schiste (Radio-Canada).
Il faut cependant reconnaître que la ressource (en Alberta comme ici) est là, qu’elle a de la valeur, et qu’il y a certainement un incitatif (c’est-à-dire pas seulement un bénéfice pour le secteur privé) à l’exploiter. Par contre –et c’est là que le raisonnement de groupes comme Équiterre sonne juste- les réserves totales de pétrole albertain, bien que massives, ne sont pas éternelles. Or, si la ressource ne peut que diminuer, pourquoi le gouvernement fédéral tarde-t-il à établir une stratégie énergétique fortement axée sur le développement des énergies renouvelables (tu veux parler d’innovation? ben quin!), tout en gérant l’exploitation sécuritaire et (éco)responsable des ressources naturelles qui font la richesse de ce pays.
Et côté gaz de schiste, rien ne prouve que les ressources soient suffisantes pour justifier les coûts (et les risques) liés à l’extraction. Les avis diffèrent certes sur les quantités exploitables, et il y a lieu de douter que ce soit Craig Leonard (ministre de l’Énergie) qui ait les données justes (Radio-Canada).
Bref, une dernière question persiste, à laquelle il n’y aura réponse qu’après la mise en opération de l’oléoduc, en 2018, et l’éventuelle développement –ou non- d’une industrie du schiste : combien?
La réponse, on la devine facilement car c’est toujours la même : moins qu’on pense. MAIS : est-ce tout de même mieux que rien? Et à quel prix, à quel impact sur notre environnement et les vies de nos citoyens? Faire un pas de l’avant pour en prendre deux de l’arrière, c’est malheureusement une tendance quasi-historique au N-B : pensons à long terme.
Targuez-moi de pessimisme, mais je lis, j’écoute, et tout ça me semble trop beau pour être vrai. Des profits au privé ET des investissements en éducation, en santé et dans les programmes sociaux? Et subitement Irving va payer la note?
Hmmm.
jeudi 8 août 2013
Projet Énergie Est de TransCanada : 2) l’aspect écologique
par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
L’environnement est un enjeu de taille dans la réalisation du projet Énergie Est. Pas que ce soit une embûche majeure dans la concrétisation du projet : la soumission doit essentiellement recevoir l’aval du Conseil canadien de l’Énergie. Mais puisque le CCÉ relève d’Industrie Canada, ce ne devrait être que formalité (Le Devoir). En principe, le CCÉ doit s’assurer que toutes les précautions ont été prises par TransCanada pour aboutir sur un oléoduc conforme aux exigences de l’industrie, avec des garanties de sécurité suffisantes au point de vue écologique.
Non, ce n’est pas à Ottawa que l’environnement sera un enjeu majeur dans ce projet : c’est dans les consultations publiques qui doivent déterminer le tracé du nouveau tronçon de l’oléoduc reliant l’Ontario au Nouveau-Brunswick.
Encore là, pas de problème en vue au N-B : le projet a reçu très tôt le soutien de la classe politique et les consultations préliminaires le long du tracé proposé ne laissent entrevoir que des modifications mineures, et somme toute peu d’inquiétudes (Radio-Canada). En Alberta, la très enthousiasmée Allison Redford a même qualifié l’oléoduc de «projet fondateur pour la nation», au même titre que l’a été le chemin de fer transcanadien en 1867.
Oui, mais à quel prix? Si le simple fait de faire miroiter les retombées économiques suffit à en aveugler plusieurs – et c’est la cas chez nous – le Québec n’est pas encore gagné pour TransCanada. Cependant, Québec n’a formulé aucune objection formelle au projet tel que mis de l’avant par la pétrolière; le gouvernement Marois se laisse courtiser. Car la majeure partie des 1400 kilomètres du nouvel oléoduc passera en sol québécois, approvisionnant en cours de route les deux raffineries québécoises, Suncor (Montréal) et Ultramar (Lévis) en plus d’un éventuel terminal au port de Québec avant de plonger vers Saint-Jean.
Il faudra, clairement, que le jeu en vaille la chandelle pour le Québec; et ce n’est certainement pas d’aider à bâtir la nation canadienne qui sera vendeur!
La World Wildlife Fund (WWF) et Équiterre ont d’ailleurs émis un communiqué début août pour faire contrepoids à toutes les flagorneries industrielles dans les médias nationaux et discours politiques. D’une part, ces organismes déplorent les risques environnementaux à long terme que devra assumer Québec, dans le seul espoir de gains économiques à court terme. Également, ils font valoir que l’extraction du pétrole des sables bitumineux albertains «émet 3 à 4 fois plus d’émissions de GES que le pétrole conventionnel du Canada ou des Etats-Unis» (WWF Canada). Au passage, la WWF écorche le gouvernement conservateur de soutenir le projet «en l’absence d’une stratégie énergétique nationale qui tienne compte des changements climatiques». Une telle stratégie devrait viser à long terme le «sevrage» de la dépendance canadienne aux combustibles fossiles. Selon Équiterre, le projet Énergie Est nous «enferme encore longtemps dans une économie axée sur le pétrole», et il faut au contraire miser sur les énergies propres et renouvelables.
Point intéressant : le communiqué précise que bien que les déversements de pétrole soient plus fréquents dans le transport ferroviaire, les volumes déversés dans les bris d’oléoducs sont trois fois plus importants (Agence internationale de l’énergie). Ce qui suscite une question: quand cesse-t-on de parler (ou de ne pas parler, justement) de «bris mineur», ou d’«incident», pour parler de «déversement»? À combien de tonnes se situe la barre?
Il demeure que, lorsque questionnés sur les règlmentations qui entoureront la construction et la mise en service de l’oléoduc, tous les intervenants s’entendent pour dire qu’il est capital que les normes en place soient respectées pour que le projet aille de l’avant. David Alward a déclaré à la radio de CBC qu’il «n’est pas question d’atteindre la prospérité économique par la voie de la dégradation environnementale (traduction libre)» (CBC à 3 :15).
Noblesse d’âme à part, Alward a raison d’être optimiste : la partie de l’oléoduc qui traversera notre province sera non seulement neuve, construite de toutes pièces, mais spécifiquement conçue pour le transport du brut albertain, plus visqueux et plus corrosif que le pétrole traditionnel. La section existante de l’oléoduc, reliant l’Alberta au Québec, est en fait un gazoduc qui doit être converti pour le transport du brut, qui de plus a été construit dans les années 1950. Le Conseil des Canadiens (CDC), un organisme citoyen établi à Ottawa, a par ailleurs lancé une campagne d’opposition au projet axée sur la non-viabilité à long terme du projet, tant en termes de sécurité énergétique et environnementale qu’en termes d’emplois «décents» (TVA et CDC).
TransCanada, sur le site web de son projet Énergie Est, nous présente «la vérité sur les oléoducs», en nommant une longue liste de «mythes et faits» (Oléoduc Énergie Est). Parmi les «faits» dignes de mention : les oléoducs, lorsque bien entretenus, peuvent être employés indéfiniment; le brut dilué tiré des sables bitumineux n’est pas plus corrosif que le brut classique; et les oléoducs sont sécuritaires à 99,9%.
Étant donné la responsabilité à 100% assumée par les pétrolières dans les bris d’oléoducs, j’imagine que l’entretien est un souci constant. Mais une rapide recherche sur le brut des sables bitumineux nous informe qu’il contient habituellement plus de sulfure que le brut traditionnel, et donc que ses qualités corrosives et érosives ne tiennent pas seulement à l’eau et aux particules qui peuvent. Cette information est contestée par le gouvernement canadien (Ressources naturelles Canada), qui s’appuie sur une étude récente ayant « systématiquement démoli» le mythe de la corrosivité accrue du brut des sables bitumineux.
Et il est facile de déceler un trou important dans le défense de TransCanada à l’égard de la sécurité du transport de brut par oléoduc : ils comptent acheminer le brut des sables bitumineux sur 3000 km de GAZODUC. De gazoduc converti, soit, mais certainement pas rebâti à neuf; malgré l’intérêt de la pétrolière à garantir la sécurité du transport de la ressource, il y a raison de douter des assurances fournies sur la sécurité.
Et, j’y reviens encore, on parle des déversements – et c ‘est vrai qu’ils sont plutôt rares; ou alors on a une raison valable de nous les cacher – mais qu’en est-il des fuites? Des bris mineurs? Des incidents pouvant se produire pendant l’entretien des canalisations? Ça compte pour du beurre… noir?
De plus, il faut aussi tenir compte de la feuille de route environnementale de l’extraction du pétrole des sables bitumineux. Feuille bien noircie, vous comprendrez! Un blog du quotidien français Le Monde, écrit après le retrait du Canada du protocole de Kyoto en 2011, livre une critique de l’exploitation de la ressource (Le Monde). À son entrée dans le protocole en 1997, le Canada s’engageait à réduire de 6% (relativement aux niveaux de 1990) ses émissions de GES. Quinze ans après, le désastre : elles ont augmenté de 17%, en grande partie en raison de l’augmentation de l’exploitation du pétrole des sables bitumineux, extrêmement polluante. Pis encore, la production quotidienne, de 1,5 millions de barils en 2011, doit culminer à 3,5 millions de barils en 2025…
En clair, la performance environnementale du Canada, qui s’est retiré du protocole de Kyoto en l’accusant d’être inefficace - notamment parce qu’il ne contraint pas des pays aux industries émergentes (faiblement règlementées et souvent extrêmement polluantes), comme la Chine et l’Inde par exemple, à réduire leurs émissions – ne peut qu’empirer au fil de la prochaine décennie.
C’est pire ailleurs, oui. Mais ça pourrait certainement être mieux ici.
Ainsi donc, en conclusion de cette deuxième partie de notre regard sur le projet Énergie Est, on constate que les garanties environnementales qui accompagnent le projet sont généralement limitées à l’oléoduc lui-même et aux risques qu’il comporte, et laissent de côté la (piètre) performance de l’industrie en général. Par contre, et il faut le reconnaître, le gouvernement Alward semble sincèrement dédié à mettre en place un cadre strict à l’exploitation du tracé d’oléoduc. Il a intérêt à le faire, car quand viendra le temps de développer l’industrie du gaz de schiste (et il y compte bien), ce cadre sera d’une importance capitale.
Reste qu’un cadre strict, ça n’a jamais empêché les accidents; de même, on peut seulement prévoir, et jamais prédire les accidents. Cercle visqueux?
L’environnement est un enjeu de taille dans la réalisation du projet Énergie Est. Pas que ce soit une embûche majeure dans la concrétisation du projet : la soumission doit essentiellement recevoir l’aval du Conseil canadien de l’Énergie. Mais puisque le CCÉ relève d’Industrie Canada, ce ne devrait être que formalité (Le Devoir). En principe, le CCÉ doit s’assurer que toutes les précautions ont été prises par TransCanada pour aboutir sur un oléoduc conforme aux exigences de l’industrie, avec des garanties de sécurité suffisantes au point de vue écologique.
Non, ce n’est pas à Ottawa que l’environnement sera un enjeu majeur dans ce projet : c’est dans les consultations publiques qui doivent déterminer le tracé du nouveau tronçon de l’oléoduc reliant l’Ontario au Nouveau-Brunswick.
Encore là, pas de problème en vue au N-B : le projet a reçu très tôt le soutien de la classe politique et les consultations préliminaires le long du tracé proposé ne laissent entrevoir que des modifications mineures, et somme toute peu d’inquiétudes (Radio-Canada). En Alberta, la très enthousiasmée Allison Redford a même qualifié l’oléoduc de «projet fondateur pour la nation», au même titre que l’a été le chemin de fer transcanadien en 1867.
Oui, mais à quel prix? Si le simple fait de faire miroiter les retombées économiques suffit à en aveugler plusieurs – et c’est la cas chez nous – le Québec n’est pas encore gagné pour TransCanada. Cependant, Québec n’a formulé aucune objection formelle au projet tel que mis de l’avant par la pétrolière; le gouvernement Marois se laisse courtiser. Car la majeure partie des 1400 kilomètres du nouvel oléoduc passera en sol québécois, approvisionnant en cours de route les deux raffineries québécoises, Suncor (Montréal) et Ultramar (Lévis) en plus d’un éventuel terminal au port de Québec avant de plonger vers Saint-Jean.
Il faudra, clairement, que le jeu en vaille la chandelle pour le Québec; et ce n’est certainement pas d’aider à bâtir la nation canadienne qui sera vendeur!
La World Wildlife Fund (WWF) et Équiterre ont d’ailleurs émis un communiqué début août pour faire contrepoids à toutes les flagorneries industrielles dans les médias nationaux et discours politiques. D’une part, ces organismes déplorent les risques environnementaux à long terme que devra assumer Québec, dans le seul espoir de gains économiques à court terme. Également, ils font valoir que l’extraction du pétrole des sables bitumineux albertains «émet 3 à 4 fois plus d’émissions de GES que le pétrole conventionnel du Canada ou des Etats-Unis» (WWF Canada). Au passage, la WWF écorche le gouvernement conservateur de soutenir le projet «en l’absence d’une stratégie énergétique nationale qui tienne compte des changements climatiques». Une telle stratégie devrait viser à long terme le «sevrage» de la dépendance canadienne aux combustibles fossiles. Selon Équiterre, le projet Énergie Est nous «enferme encore longtemps dans une économie axée sur le pétrole», et il faut au contraire miser sur les énergies propres et renouvelables.
Point intéressant : le communiqué précise que bien que les déversements de pétrole soient plus fréquents dans le transport ferroviaire, les volumes déversés dans les bris d’oléoducs sont trois fois plus importants (Agence internationale de l’énergie). Ce qui suscite une question: quand cesse-t-on de parler (ou de ne pas parler, justement) de «bris mineur», ou d’«incident», pour parler de «déversement»? À combien de tonnes se situe la barre?
Il demeure que, lorsque questionnés sur les règlmentations qui entoureront la construction et la mise en service de l’oléoduc, tous les intervenants s’entendent pour dire qu’il est capital que les normes en place soient respectées pour que le projet aille de l’avant. David Alward a déclaré à la radio de CBC qu’il «n’est pas question d’atteindre la prospérité économique par la voie de la dégradation environnementale (traduction libre)» (CBC à 3 :15).
Noblesse d’âme à part, Alward a raison d’être optimiste : la partie de l’oléoduc qui traversera notre province sera non seulement neuve, construite de toutes pièces, mais spécifiquement conçue pour le transport du brut albertain, plus visqueux et plus corrosif que le pétrole traditionnel. La section existante de l’oléoduc, reliant l’Alberta au Québec, est en fait un gazoduc qui doit être converti pour le transport du brut, qui de plus a été construit dans les années 1950. Le Conseil des Canadiens (CDC), un organisme citoyen établi à Ottawa, a par ailleurs lancé une campagne d’opposition au projet axée sur la non-viabilité à long terme du projet, tant en termes de sécurité énergétique et environnementale qu’en termes d’emplois «décents» (TVA et CDC).
TransCanada, sur le site web de son projet Énergie Est, nous présente «la vérité sur les oléoducs», en nommant une longue liste de «mythes et faits» (Oléoduc Énergie Est). Parmi les «faits» dignes de mention : les oléoducs, lorsque bien entretenus, peuvent être employés indéfiniment; le brut dilué tiré des sables bitumineux n’est pas plus corrosif que le brut classique; et les oléoducs sont sécuritaires à 99,9%.
Étant donné la responsabilité à 100% assumée par les pétrolières dans les bris d’oléoducs, j’imagine que l’entretien est un souci constant. Mais une rapide recherche sur le brut des sables bitumineux nous informe qu’il contient habituellement plus de sulfure que le brut traditionnel, et donc que ses qualités corrosives et érosives ne tiennent pas seulement à l’eau et aux particules qui peuvent. Cette information est contestée par le gouvernement canadien (Ressources naturelles Canada), qui s’appuie sur une étude récente ayant « systématiquement démoli» le mythe de la corrosivité accrue du brut des sables bitumineux.
Et il est facile de déceler un trou important dans le défense de TransCanada à l’égard de la sécurité du transport de brut par oléoduc : ils comptent acheminer le brut des sables bitumineux sur 3000 km de GAZODUC. De gazoduc converti, soit, mais certainement pas rebâti à neuf; malgré l’intérêt de la pétrolière à garantir la sécurité du transport de la ressource, il y a raison de douter des assurances fournies sur la sécurité.
Et, j’y reviens encore, on parle des déversements – et c ‘est vrai qu’ils sont plutôt rares; ou alors on a une raison valable de nous les cacher – mais qu’en est-il des fuites? Des bris mineurs? Des incidents pouvant se produire pendant l’entretien des canalisations? Ça compte pour du beurre… noir?
De plus, il faut aussi tenir compte de la feuille de route environnementale de l’extraction du pétrole des sables bitumineux. Feuille bien noircie, vous comprendrez! Un blog du quotidien français Le Monde, écrit après le retrait du Canada du protocole de Kyoto en 2011, livre une critique de l’exploitation de la ressource (Le Monde). À son entrée dans le protocole en 1997, le Canada s’engageait à réduire de 6% (relativement aux niveaux de 1990) ses émissions de GES. Quinze ans après, le désastre : elles ont augmenté de 17%, en grande partie en raison de l’augmentation de l’exploitation du pétrole des sables bitumineux, extrêmement polluante. Pis encore, la production quotidienne, de 1,5 millions de barils en 2011, doit culminer à 3,5 millions de barils en 2025…
En clair, la performance environnementale du Canada, qui s’est retiré du protocole de Kyoto en l’accusant d’être inefficace - notamment parce qu’il ne contraint pas des pays aux industries émergentes (faiblement règlementées et souvent extrêmement polluantes), comme la Chine et l’Inde par exemple, à réduire leurs émissions – ne peut qu’empirer au fil de la prochaine décennie.
C’est pire ailleurs, oui. Mais ça pourrait certainement être mieux ici.
Ainsi donc, en conclusion de cette deuxième partie de notre regard sur le projet Énergie Est, on constate que les garanties environnementales qui accompagnent le projet sont généralement limitées à l’oléoduc lui-même et aux risques qu’il comporte, et laissent de côté la (piètre) performance de l’industrie en général. Par contre, et il faut le reconnaître, le gouvernement Alward semble sincèrement dédié à mettre en place un cadre strict à l’exploitation du tracé d’oléoduc. Il a intérêt à le faire, car quand viendra le temps de développer l’industrie du gaz de schiste (et il y compte bien), ce cadre sera d’une importance capitale.
Reste qu’un cadre strict, ça n’a jamais empêché les accidents; de même, on peut seulement prévoir, et jamais prédire les accidents. Cercle visqueux?
mardi 6 août 2013
Projet Énergie Est de TransCanada : 1) l’aspect économique
par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
Cette semaine, on blogue pétrole! Pétrole, et non «produits d’énergie» comme s’évertue à le nommer Harper. Comme si la bouse de vache était un «produit de digestion»… Vous avez certainement entendu que la pétrolière TransCanada va de l’avant avec son projet d’oléoduc Ouest-Est, et que le gouvernement de notre province tient à peine dans ses culottes depuis l’annonce; alors, nous avons cru bon de regarder les principaux aspects de cette question, et de son impact pour le N-B.
Donc :
En écoutant ce matin Le Réveil avec Michel Doucet (Radio-Canada à 7h48), j’ai appris que le premier ministre du N-B, David Alward, considère la venue de l’oléoduc TransCanada comme «une occasion sans précédent de rebâtir les bases de notre économie [et] de financer des programmes sociaux». Il va même jusqu’à qualifier l’oléoduc d’événement qui changera le cours de l’histoire de notre province.
Vraiment? Peut-être l’histoire du mandat d’Alward, mais de la province…
Voyons un peu : selon l’éditorialiste François Gravel de l’Acadie Nouvelle (CapAcadie), Frank McKenna (qui s’y connaît en profits), estime que l’oléoduc de TransCanada génèrera des redevances de 7 milliards$ au Nouveau-Brunswick. Je ne peux confirmer cette information : toutes les sommes avancées par McKenna (dont le 7 milliards$ dont parle Gravel) sont plutôt liées au développement de l’industrie du gaz de schiste (CHQC Saint-Jean; et CBC). McKenna demeure vague sur les sommes auxquelles doivent s’attendre les Néo-Brunswickois en termes de redevances pétrolières, si même il y fait allusion.
Une seule chose est certaine, les revenus provinciaux émaneront de deux sources principales : les redevances (qui sont calculées selon un taux appliqué aux profits de l’industrie), et la taxation foncière (que doit payer annuellement TransCanada pour les terres où passe l’oléoduc). Le reste des retombées découleront des emplois créés par l’industrie, et qui se traduiront par une hausse des revenus de taxation et d’imposition.
Il semble peu probable que le N-B puisse percevoir des redevances auprès de TransCanada, en simple raison du fait que le pétrole qui circulera dans l’oléoduc est extrait en Alberta, et ne sera que raffiné ici. L’Alberta, en contrepartie, recueille la part du lion en voyant ses redevances pétrolières augmenter à mesure que l’ouverture des marchés d’exportation permet la hausse du prix du baril de brut. Le baril de brut albertain se vend actuellement de 20$ à 25$ (ou 20%) moins cher aux Etats-Unis, son principal acheteur (Radio-Canada).
Irving a par contre annoncé qu’il comptait ajouter à ses installations de Saint-Jean un nouveau terminal en eau profonde, au coût de 300 millions$, afin d’étendre ses capacités d’exportation (CapAcadie). Plus d’approvisionnement (en vertu de l’oléoduc) permettra d’augmenter la production, et de là l’exportation de pétrole issu de la raffinerie Irving. Cela signifie plus d’emplois à Saint-Jean, donc plus de retombées pour le gouvernement provincial. Mais aussi, et surtout, cela représente une importante hausse des profits chez Irving, et de là des revenus supplémentaires sous forme de redevances pour le N-B.
Le bénéfice du N-B dans cette affaire se limite à peu près à cela. Je ne sais pas à quel taux d’imposition la province astreindra TransCanada pour son oléoduc, mais vu la politique de «bras grands ouverts» démontrée par Alward depuis le début de l’affaire, ce ne sera certainement pas trop corsé.
Donc il ne faut pas se leurrer : les profits ici, ou en Alberta, ou à n’importe quel autre point le long de l’oléoduc (plus sur le tracé dans le prochain blogue), resteront largement entre les mains des pétrolières et des raffineries, ainsi que, dans une moindre mesure, celles des gouvernements provinciaux. Quand à ce qu’ils en feront…
Et le p’tit monde, là-dedans?
L’approvisionnement en brut «bon marché» de l’Alberta n’aboutira pas sur une baisse significative du prix de l’essence pour les contribuables. Pourquoi? Parce que l’objectif de l’oléoduc est justement d’atteindre la parité – et idéalement plus vous l’aurez compris – avec le prix du brut sur les marchés mondiaux. La raffinerie Irving, dans l’intervalle, engrangera des profits record qu’elle nous vendra comme un retour attendu sur l’investissement dans ses infrastructures. J’entend déjà les «si on baisse les prix, on le fait à perte en raison des montants investis dans les nouvelles installations… en passant, on peut-tu les monter un brin?»
Ce serait surprenant que Irving Oil prenne une hypothèque sur son nouveau terminal…
Ceci conclut la première partie de notre regard sur la manne pétrolière au N-B : en clair, qui en profite? L’industrie pétrolière. Il convient maintenant de se pencher sur l’impact social et écologique de l’oléoduc. À suivre!
Cette semaine, on blogue pétrole! Pétrole, et non «produits d’énergie» comme s’évertue à le nommer Harper. Comme si la bouse de vache était un «produit de digestion»… Vous avez certainement entendu que la pétrolière TransCanada va de l’avant avec son projet d’oléoduc Ouest-Est, et que le gouvernement de notre province tient à peine dans ses culottes depuis l’annonce; alors, nous avons cru bon de regarder les principaux aspects de cette question, et de son impact pour le N-B.
Donc :
En écoutant ce matin Le Réveil avec Michel Doucet (Radio-Canada à 7h48), j’ai appris que le premier ministre du N-B, David Alward, considère la venue de l’oléoduc TransCanada comme «une occasion sans précédent de rebâtir les bases de notre économie [et] de financer des programmes sociaux». Il va même jusqu’à qualifier l’oléoduc d’événement qui changera le cours de l’histoire de notre province.
Vraiment? Peut-être l’histoire du mandat d’Alward, mais de la province…
Voyons un peu : selon l’éditorialiste François Gravel de l’Acadie Nouvelle (CapAcadie), Frank McKenna (qui s’y connaît en profits), estime que l’oléoduc de TransCanada génèrera des redevances de 7 milliards$ au Nouveau-Brunswick. Je ne peux confirmer cette information : toutes les sommes avancées par McKenna (dont le 7 milliards$ dont parle Gravel) sont plutôt liées au développement de l’industrie du gaz de schiste (CHQC Saint-Jean; et CBC). McKenna demeure vague sur les sommes auxquelles doivent s’attendre les Néo-Brunswickois en termes de redevances pétrolières, si même il y fait allusion.
Une seule chose est certaine, les revenus provinciaux émaneront de deux sources principales : les redevances (qui sont calculées selon un taux appliqué aux profits de l’industrie), et la taxation foncière (que doit payer annuellement TransCanada pour les terres où passe l’oléoduc). Le reste des retombées découleront des emplois créés par l’industrie, et qui se traduiront par une hausse des revenus de taxation et d’imposition.
Il semble peu probable que le N-B puisse percevoir des redevances auprès de TransCanada, en simple raison du fait que le pétrole qui circulera dans l’oléoduc est extrait en Alberta, et ne sera que raffiné ici. L’Alberta, en contrepartie, recueille la part du lion en voyant ses redevances pétrolières augmenter à mesure que l’ouverture des marchés d’exportation permet la hausse du prix du baril de brut. Le baril de brut albertain se vend actuellement de 20$ à 25$ (ou 20%) moins cher aux Etats-Unis, son principal acheteur (Radio-Canada).
Irving a par contre annoncé qu’il comptait ajouter à ses installations de Saint-Jean un nouveau terminal en eau profonde, au coût de 300 millions$, afin d’étendre ses capacités d’exportation (CapAcadie). Plus d’approvisionnement (en vertu de l’oléoduc) permettra d’augmenter la production, et de là l’exportation de pétrole issu de la raffinerie Irving. Cela signifie plus d’emplois à Saint-Jean, donc plus de retombées pour le gouvernement provincial. Mais aussi, et surtout, cela représente une importante hausse des profits chez Irving, et de là des revenus supplémentaires sous forme de redevances pour le N-B.
Le bénéfice du N-B dans cette affaire se limite à peu près à cela. Je ne sais pas à quel taux d’imposition la province astreindra TransCanada pour son oléoduc, mais vu la politique de «bras grands ouverts» démontrée par Alward depuis le début de l’affaire, ce ne sera certainement pas trop corsé.
Donc il ne faut pas se leurrer : les profits ici, ou en Alberta, ou à n’importe quel autre point le long de l’oléoduc (plus sur le tracé dans le prochain blogue), resteront largement entre les mains des pétrolières et des raffineries, ainsi que, dans une moindre mesure, celles des gouvernements provinciaux. Quand à ce qu’ils en feront…
Et le p’tit monde, là-dedans?
L’approvisionnement en brut «bon marché» de l’Alberta n’aboutira pas sur une baisse significative du prix de l’essence pour les contribuables. Pourquoi? Parce que l’objectif de l’oléoduc est justement d’atteindre la parité – et idéalement plus vous l’aurez compris – avec le prix du brut sur les marchés mondiaux. La raffinerie Irving, dans l’intervalle, engrangera des profits record qu’elle nous vendra comme un retour attendu sur l’investissement dans ses infrastructures. J’entend déjà les «si on baisse les prix, on le fait à perte en raison des montants investis dans les nouvelles installations… en passant, on peut-tu les monter un brin?»
Ce serait surprenant que Irving Oil prenne une hypothèque sur son nouveau terminal…
Ceci conclut la première partie de notre regard sur la manne pétrolière au N-B : en clair, qui en profite? L’industrie pétrolière. Il convient maintenant de se pencher sur l’impact social et écologique de l’oléoduc. À suivre!
vendredi 2 août 2013
Tournée Éducation: Un projet de société - Dernière soirée à Moncton
La tournée provinciale de la FÉÉCUM prenait fin hier au Café Aberdeen à Moncton, où on a poursuivi la discussion sur l'Éducation sous toutes ses formes (de la petite enfance au 3e age). Voici ce qui s'est rendu sur Twitter :
"Il ne faut pas surévaluer l'éducation post-secondaire"
"Tout le monde n'est pas fait pour l'université, ne pas les laisser de côté."
"Il faut valoriser toute l'éducation post-secondaire, chaque métier, car tout le monde n'a pas accès à l'université."
"Il faut plus de proximité des politiques avec le peuple."
"L'éducation n'est pas un projet 'sexy', c'est pas un moyen de remporter des votes."
"Il faut un regain d'intérêt sur ce qu'il se passe chez nous."
"Comment faire en sorte que l'éducation soit considérée?"
"Il n'y a pas de honte à être soudeur ou autre. L'éducation actuelle a perdu ça."
"Il faut savoir enlever le mot école à éducation."
"On devrait orienter les étudiants vers leurs envies et non seulement leurs capacités"
"Il faut rassembler, trouver des partenaires pour avoir une vraie force qui compte et qui dure !"
@ECVManon : Ma force, je l'ai trouvé par le biais de Twitter avec les technopédagogues qui s'y retrouvent.
"Il faudrait un système d'aide financière afin d'inciter nos jeunes à rester dans notre province."
La FÉÉCUM souhaite remercier tous les intervenants qui sont venu la rencontrer pour participer à cette important discussion sur l'avenir de la province, une discussion qui est loin d'être terminée. La Fédération étudiante aura bien d'autres rencontres de la sorte au courant de la l'année universitaire.
"Il ne faut pas surévaluer l'éducation post-secondaire"
"Tout le monde n'est pas fait pour l'université, ne pas les laisser de côté."
"Il faut valoriser toute l'éducation post-secondaire, chaque métier, car tout le monde n'a pas accès à l'université."
"Il faut plus de proximité des politiques avec le peuple."
"L'éducation n'est pas un projet 'sexy', c'est pas un moyen de remporter des votes."
"Il faut un regain d'intérêt sur ce qu'il se passe chez nous."
"Comment faire en sorte que l'éducation soit considérée?"
"Il n'y a pas de honte à être soudeur ou autre. L'éducation actuelle a perdu ça."
"Il faut savoir enlever le mot école à éducation."
"On devrait orienter les étudiants vers leurs envies et non seulement leurs capacités"
"Il faut rassembler, trouver des partenaires pour avoir une vraie force qui compte et qui dure !"
@ECVManon : Ma force, je l'ai trouvé par le biais de Twitter avec les technopédagogues qui s'y retrouvent.
"Il faudrait un système d'aide financière afin d'inciter nos jeunes à rester dans notre province."
La FÉÉCUM souhaite remercier tous les intervenants qui sont venu la rencontrer pour participer à cette important discussion sur l'avenir de la province, une discussion qui est loin d'être terminée. La Fédération étudiante aura bien d'autres rencontres de la sorte au courant de la l'année universitaire.
jeudi 1 août 2013
(Ré)pétitions, (com)pétitions…
par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
Une pétition visant à «préserver les acquis des Acadiens du N-B» circule sur le web depuis le 23 juillet (La pétition). Faisant écho à une autre pétition (La pétition), celle-ci visant à «mettre fin à la discrimination à l’emploi envers les unilingues anglophones», l’objectif visé est de 6 000 signatures.
La pétition anglophone approche des 5 000 signatures, depuis sa publication il y a un peu plus d’un mois. Sa réplique francophone, 800 signatures en une semaine.
Beau duel de coups d’épée dans l’eau.
Le fait qu’aucune de ces deux pétitions, malgré toutes les bonnes intentions à la source de leur création, ne sont recevables par le gouvernement de la province, même si toutes deux lui sont expressément adressées.
Pourquoi? Malgré l’ambigüité des règles officielles de la législature provinciale sur les pétitions (GNB), une pétition doit comprendre les signatures originales de celles et ceux qui y apportent leur soutien. Cela est évidemment impossible quand on parle d’une pétition lancée sur le web. Cette information nous a été confirmée par l’assemblée législative du Nouveau-Brunswick.
Or donc, ces deux «pétitions» ont le même poids législatif que, disons, la page facebook où vous pouvez «liker» de mignons minets (Aaaaaaawwwwwwww).
Il demeure que, lorsque questionnée sur la raison de sa signature à la pétition pour la préservation des acquis des Acadiens du N-B, Jeanne d’Arc Gaudet, présidente de la SANB, a répondu à Michel Doucet à l’émission Le Réveil du 29 juillet qu’elle soutenait –en son nom personnel et non en celui de la SANB- ce que la pétition représente. C’est-à-dire qu’elle approuve l’usage des «nouveaux outils démocratiques» par les citoyennes et citoyens de mieux en mieux éduqués et informés, pour faire entendre leur opinion sur les questions politiques. Donc, le geste, l’initiative des gens à l’origine de la pétition, voilà ce qu’elle soutient.
Admettons que la pétition, du moins d’un point de vue idéologique, peut témoigner d’un soutien (au minimum moral) de la cause embrassée ou défendue. Aussi, et ce n’est pas à négliger, peuvent-elles fournir une belle occasion de se faire du capital politique à peu de frais… Hein, Kris Austin (People’s Alliance of N-B)?
Fait-on alors plutôt affaire à une guerre de signatures que d’une guerre de pétitions, comme la nomme Radio-Canada (Radio-Canada)?
Une chose est sure, lorsqu’on parle –avec ou sans faits à l’appui- de bilinguisme au Nouveau-Brunswick, ce n’est jamais bien difficile de faire sortir les enragés, et ce dans les deux camps. Évidemment, cela sans exclure les gens sensés.
Alors en attendant une véritable pétition (et qu’est-ce que ça donnerait je vous le demande?) sur le bilinguisme officiel, pour ou contre, il y a toujours moyen de faire une différence en agissant, au jour le jour, suivant nos convictions.
Parce que souscrire à une pétition sur internet ne suffit peut-être pas, am I right?
Une pétition visant à «préserver les acquis des Acadiens du N-B» circule sur le web depuis le 23 juillet (La pétition). Faisant écho à une autre pétition (La pétition), celle-ci visant à «mettre fin à la discrimination à l’emploi envers les unilingues anglophones», l’objectif visé est de 6 000 signatures.
La pétition anglophone approche des 5 000 signatures, depuis sa publication il y a un peu plus d’un mois. Sa réplique francophone, 800 signatures en une semaine.
Beau duel de coups d’épée dans l’eau.
Le fait qu’aucune de ces deux pétitions, malgré toutes les bonnes intentions à la source de leur création, ne sont recevables par le gouvernement de la province, même si toutes deux lui sont expressément adressées.
Pourquoi? Malgré l’ambigüité des règles officielles de la législature provinciale sur les pétitions (GNB), une pétition doit comprendre les signatures originales de celles et ceux qui y apportent leur soutien. Cela est évidemment impossible quand on parle d’une pétition lancée sur le web. Cette information nous a été confirmée par l’assemblée législative du Nouveau-Brunswick.
Or donc, ces deux «pétitions» ont le même poids législatif que, disons, la page facebook où vous pouvez «liker» de mignons minets (Aaaaaaawwwwwwww).
Il demeure que, lorsque questionnée sur la raison de sa signature à la pétition pour la préservation des acquis des Acadiens du N-B, Jeanne d’Arc Gaudet, présidente de la SANB, a répondu à Michel Doucet à l’émission Le Réveil du 29 juillet qu’elle soutenait –en son nom personnel et non en celui de la SANB- ce que la pétition représente. C’est-à-dire qu’elle approuve l’usage des «nouveaux outils démocratiques» par les citoyennes et citoyens de mieux en mieux éduqués et informés, pour faire entendre leur opinion sur les questions politiques. Donc, le geste, l’initiative des gens à l’origine de la pétition, voilà ce qu’elle soutient.
Admettons que la pétition, du moins d’un point de vue idéologique, peut témoigner d’un soutien (au minimum moral) de la cause embrassée ou défendue. Aussi, et ce n’est pas à négliger, peuvent-elles fournir une belle occasion de se faire du capital politique à peu de frais… Hein, Kris Austin (People’s Alliance of N-B)?
Fait-on alors plutôt affaire à une guerre de signatures que d’une guerre de pétitions, comme la nomme Radio-Canada (Radio-Canada)?
Une chose est sure, lorsqu’on parle –avec ou sans faits à l’appui- de bilinguisme au Nouveau-Brunswick, ce n’est jamais bien difficile de faire sortir les enragés, et ce dans les deux camps. Évidemment, cela sans exclure les gens sensés.
Alors en attendant une véritable pétition (et qu’est-ce que ça donnerait je vous le demande?) sur le bilinguisme officiel, pour ou contre, il y a toujours moyen de faire une différence en agissant, au jour le jour, suivant nos convictions.
Parce que souscrire à une pétition sur internet ne suffit peut-être pas, am I right?
Tournée Éducation: Un projet de société - Hier à Edmundston
La tournée provinciale de la FÉÉCUM se rendait hier au Resto-Bar Le Deck à Edmundston pour jaser Éducation sous toutes ses formes (de la petite enfance au 3e age) avec des gens de la capitale. Twitter nous fait un compte-rendu :
"Il y a un gros manque de projets communautaires"
"Manque de suivi à la sortie de l'université" Encore une fois
"Il fait créer un meilleur contact employeur-étudiant"
"Il faut savoir viser plus haut pour tomber moins bas"
"La réduction des frais de 25%, c'est ce genre de projet audacieux qu'il faut inciter"
@Siskoid : Entendu dire que le pres. de l'asso étudiante de l'UMCE aurait dit que faut juste s'habituer à s'endetter?
@Siskoid : Est-ce vrai? Pcq si oui, ça me fait honte pour mon alma mater et ma région, plus "conservateur" qu'étudiant comme idéal.
@kevinarseneau : En effet! J'ai resté bouche bée! Il y a un grand manque d'autonomie du mouvement étudiant, on ressent fortement les influences
@teesock : Je suis sans mots.
@MlleGabRoss : Rendez-vous au Café Aberdeen à 18h pour discuter d'#EducNB avec @OuelletteSimon et @kevinarseneau de la @FEECUM! #Moncton
La prochaine et dernière rencontre se déroule ce soir, jeudi 1er août à 18h au Café Aberdeen à Moncton. Tous et toutes y sont les bienvenues. Ou suivez #EducNB et @FEECUM à distance.
"Il y a un gros manque de projets communautaires"
"Manque de suivi à la sortie de l'université" Encore une fois
"Il fait créer un meilleur contact employeur-étudiant"
"Il faut savoir viser plus haut pour tomber moins bas"
"La réduction des frais de 25%, c'est ce genre de projet audacieux qu'il faut inciter"
@Siskoid : Entendu dire que le pres. de l'asso étudiante de l'UMCE aurait dit que faut juste s'habituer à s'endetter?
@Siskoid : Est-ce vrai? Pcq si oui, ça me fait honte pour mon alma mater et ma région, plus "conservateur" qu'étudiant comme idéal.
@kevinarseneau : En effet! J'ai resté bouche bée! Il y a un grand manque d'autonomie du mouvement étudiant, on ressent fortement les influences
@teesock : Je suis sans mots.
@MlleGabRoss : Rendez-vous au Café Aberdeen à 18h pour discuter d'#EducNB avec @OuelletteSimon et @kevinarseneau de la @FEECUM! #Moncton
La prochaine et dernière rencontre se déroule ce soir, jeudi 1er août à 18h au Café Aberdeen à Moncton. Tous et toutes y sont les bienvenues. Ou suivez #EducNB et @FEECUM à distance.
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