par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
Quand tu commences à parler de budget ! Hier, 21 mars, était jour de dépôt du budget fédéral à Ottawa. Le ministre fédéral des finances, Jim Flaherty, maintient le cap sur l’objectif conservateur d’atteindre l’équilibre budgétaire en 2015. Une des raisons citées pour cette décision ; le Canada doit se retrouver dans une position financière solide, dans l’éventualité d’une nouvelle crise mondiale.
Tout ça a bien entendu ses mérites, mais la manière dont cet objectif doit être atteint ne plaît certes pas à tous. Au cours des prochaines heures/jours vont surgir des réactions venant de toutes parts au budget. Ce matin, L’Association canadienne des Professeurs et professeures universitaires (ACPPU) nous communique sa réaction au budget par le biais de son site web (ACPPU).
L’ACPPU considère que le fédéral porte atteinte à la capacité de recherche du Canada, et « rétrécit les possibilités de formation » avec les mesures adoptées dans son dernier budget. Un nouvel investissement de 37 M$ dans les trois conseil subventionnaires de recherche du Canada (CRSH, CRSNG, IRSC) représente la moitié de la somme qui en a été retranchée dans le budget précédent. De plus, cet investissement est limité par des conditions très étroites quant à son utilisation.
80% des fonds réinvestis dans le CRSNG doivent «soutenir la collaboration entre les collèges communautaires et l’industrie dans le cadre de projets axés sur les besoins des entreprises», et le budget recommande que les 37 M$ investis servent à «appuyer les partenariats de recherche avec l’industrie».
James L. Turk, directeur général de l’ACPPU (on est pas loin de James T. Kirk… !) a commenté en ces termes les restrictions imposées par le gouvernement Harper : «C’est dire qu’aucuns nouveaux fonds ne seront alloués à la recherche fondamentale sur laquelle reposent tous les progrès scientifiques. »
La Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) reçoit quant à elle la permission d’utiliser 225 M$ en intérêts accumulés pour soutenir l’infrastructure de recherche, mais pas de nouveaux fonds.
Flaherty, dans ses beaux souliers neufs (tcheu tradition !), maintient la hausse annuelle de 3% dans les transferts provinciaux destinés à l’éducation postsecondaire, ce qui, selon M. Turk, demeure en-dessous des sommes engendrées par la combinaison de l’inflation et de la hausse des effectifs étudiants. M. Turk prévient que le manque à gagner ainsi créé débouchera sur une hausse des droits de scolarité et une réduction des programmes.
Et le clou du spectacle, maintenant. Voici où ira le gros des nouveaux investissements dans l’ÉPS : 19 M$ sur deux ans pour promouvoir auprès des jeunes les domaines d’études que le gouvernement estime importants, 10 M$ pour le marketing visant à attirer les étudiants étrangers, et 13 M$ pour financer des stages d’été université-industrie.
Au niveau de la formation professionnelle, le gouvernement fédéral assumera désormais le contrôle de 300 M$ (soit 60% du portefeuille de 500 M$), les 200 M$ restants étant distribués aux provinces. C’est de ce portefeuille que le gouvernement Alward s’est récemment servi pour créer le programme de formation des travailleurs destinés à compenser le «trou noir» dans les prestations d’assurance-emploi. Je ne sais pas si c’était officiellement un programme ou un projet-pilote, mais je pense qu’on peut affirmer que le pilote a quitté l’appareil et que le voyage est terminé !
Les 300 M$ administrés par Ottawa prendront la forme d’un partenariat fédéral-provincial-privé d’investissement pour la création d’emplois, chacun contribuant la somme de 5000$ pour un total de 15 000$ en subventions pour la création d’un nouvel emploi.
On devine que ce sont les entreprises privés de grande et de très grande taille qui profiteront le plus (Harper dira «investiront le plus» sans doute) dans ce nouveau programme. Entre temps, pas un mot sur les sciences humaines, ou sur la recherche médicale, ou du moins pas encore.
Et quand y’aura plus de pétrole, quelle genre de société peut-on s’attendre à voir au Canada ?
Pour terminer sur une note positive : le 26 mars prochain, le gouvernement Alward doit à son tour dévoiler son budget pour l’année 2013-2014. Avec un déficit qui a doublé les prévisions en 2012-2013, je suis certain que l’ÉPS peut s’attendre à des investissements substantiels, afin d’encourager les pratiques innovatrices et l’avancement de la connaissance académique et scientifique, en n’oubliant pas bien entendu de s’attarder à l’amélioration de la condition étudiante.
…
Sinon, hé bien, dépoussiérons nos pics et nos pelles !
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