par Michel M. Albert, agent de communication
À mon tour de me prêter à une analyse de la situation médiatique des derniers jours pour faire le point sur les propos de notre président, de la tournure que cela a pris dans les médias, et des réactions que cela a suscité de parts et d'autres.
Ce qui n'a pas transparu à la télé
Évidemment, on perd toujours au montage. La télévision est un grand réducteur et il est pour elle impossible de rendre justice au plein contexte d'une situation ou même d'une entrevue. Par souci d'espace ou de temps, la même chose est vraie pour les autres médias à différents degrés. Tout de même, nous jugeons que le reportage de Mme Nadia Gaudreau du 11 juin dernier trouve moyen d'insérer la majorité des éléments importants à cette histoire, tout en rendant justice à notre point central - le besoin pour un ombudsman ou défendeur des droits étudiants à l'Université de Moncton. Tout exemple utilisé (celui de la vice-rectrice aux affaires étudiantes et internationales) n'est, du moins de notre part, qu'en appui à cette idée centrale. Ce qui n'a pas paru dans le reportage, c'est notre président en train de doser ses propos. Il a avoué ne pas pouvoir connaître les intentions de la vice-rectrice, mais soulignait que ce genre de commentaire pouvait facilement être interprété comme tentative d'intimidation et n'avait donc pas sa place dans la relation professionnelle entre un leader étudiant et un membre de la haute direction. Notre président a d'ailleurs parlé à la vice-rectrice avant la diffusion du reportage pour lui faire part du contenu de son entrevue, n'étant pas de ceux qui demandent transparence sans l'offrir lui-même. Suite à cette discussion, elle choisie de ne pas répondre aux requêtes des journalistes.
La riposte institutionnelle
24 heures plus tard, soit le 12 juin, le Téléjournal Acadie fait le compte-rendu d'un point de presse tenu par la vice-rectrice le lendemain du reportage. Selon elle, il s'agit d'un malentendu. Ses paroles ont été mal interprétées et ne faisaient pas partie d'une tentative d'intimidation ou de manipulation, mais plutôt un effort d'éduquer un jeune leader sur les réalités de son poste. Je suis prêt à la croire, mais est-ce que c'est approprié? Et je ne parle pas ici avec l'égo de l'agent de communication dont c'est le véritable travail de jouer ce rôle (« hey, c'est MA job faire ça! »), mais plutôt en connaissance du fait que la relation de la Fédération envers l'Université en est une de chien de garde. Nous collaborons sur plusieurs projets, certes, mais avons aussi le rôle de protéger les étudiants des décisions prises par l'Université qui pourrait porter atteinte à leurs droits. La Fédération doit donc pouvoir critiquer l'administration de l'Université, la questionner, pour faire son travail. On comprendra que des conseils des gens à qui on s'oppose dans de tels cas ne sont pas les mieux reçus.
Et même si nous acceptons que la vice-rectrice ne faisait pas une tentative d'intimidation en avertissant notre président que ses propos pourraient mettre en jeu sa carrière, qu'elle tentait plutôt de l'aider à naviguer les eaux houleuses de la politique universitaire, voire néo-brunswickoise, cela parle tout de même à une culture viciée au sein de nos instances décisionnelles. Si les membres du Conseil des Gouverneurs ne peuvent pas discuter et poser des questions sans peur de représailles quelconques, comment peuvent-ils prendre des décisions éclairées et impartiales? En d'autres mots, la question ce n'est pas tellement quelles étaient les intentions de la vice-rectrice, mais plutôt comment on peut endurer un système qui semble nécessiter ce type de mise en garde.
Quand peut-on parler d'intimidation?
Il est important, je crois, de noter le rapport de pouvoir entre les intervenants ici. Si un contemporain de notre président (disons un autre étudiant) avait fait la même mise en garde, il aurait pu le prendre comme conseil d'ami. Que ça vienne de quelqu'un qui a un pouvoir sur les dossiers qu'il doit traiter, on commence à se demander qu'est-ce qui se cache derrière ces paroles. Si la personne qui vous dit que votre carrière est menacée 1) pourrait vraisemblablement porter atteinte à votre trajectoire professionnelle ou académique (c'est-à-dire, a les outils pour le faire même si elle n'en a pas l'intention) et 2) aurait quelque chose à gagner de vous faire taire ou changer votre position sur un sujet (dans le sens large ici, l'UMoncton a évidemment horreur de mal paraître dans les médias vu que ça affecte le recrutement, les campagnes de financement, etc.), il est, je crois, naturel de se méfier de tels propos. Président de la FÉÉCUM ou non, ce sont le genre de paroles qui peuvent ébranler un étudiant, le faire choisir sa propre peau plutôt que le bien commun, somme toute, l'empêcher de représenter ses membres.
Et pas besoin de même faire des menaces voilées non plus. Les cadres de l'Université, tout comme ses professeurs, bénéficient de l'impression que les étudiants ont d'eux en tant que gens dont le travail est d'instruire. Le réflexe étudiant est de croire ce que professeur lui dit (et nos cadres sont pour la plupart d'anciens professeurs). Il devient donc facile pour certaines personnes de manipuler l'opinion étudiante en dehors des gonds de la salle de classe, voire même en utilisant de la désinformation. Peut-on blâmer l'étudiant qui se laisse influencer par un cadre ou un professeur ainsi? Non. Je préfère blâmer la personne qui abuse de sa relation de pouvoir, comprenant très bien que ce n'est pas toujours conscient. Pour certains, c'est devenu une mauvaise habitude.
Et c'est pourquoi nous militons depuis longtemps pour un ombudsman universitaire, quelqu'un qui peut enquêter et régler de façon indépendante les conflits d'intérêt et abus de pouvoir qui se passent de façon routinière sur le campus, autant au niveau politique qu'académique. Est-ce qu'il y a eu malfaisance? Ce n'est pas à nous de le déterminer en tant que partie impliquée. Bien que la vice-rectrice a été utilisée comme exemple, c'est loin d'être le plus choquant qui soit passé à travers nos bureaux dans les derniers 10 ans. Certains membres de la haute direction et du Conseil des gouverneurs ont fait la même chose, et moins doucement, pour ne pas parler de problèmes graves dans plusieurs unités académiques qui ont coûté à des étudiants et étudiantes sommeil, stages et diplômes. Nous préparons un blogue futur qui donnera plus d'exemples afin de démontrer la nécessité d'un défendeur des droits étudiants à l'Université de Moncton. Pour l'instant, sachez que des choses comme ça, ÇA SE PASSE et ce n'est pas beau à voir.
Pour terminer, une petite pensée à propos de la transparence qu'on demande et que l'UMoncton ne semble pas vouloir donner : Si on veut éviter des « malentendus » entre nos dirigeants et la population étudiante (et acadienne!), il faut arrêter de se cacher quand on fait des décisions. Le secret mine la confiance publique alors que la transparence joue deux rôles - la restore et encourage nos dirigeants à agir de façon plus réfléchie et éthique parce qu'ils agissent à la lumière du grand jour. Y'a une raison qu'on ne fait pas confiance aux vampires...
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