par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
En entrevue au FaceJournal Acadie du 23 janvier (Radio-Canada), la présidente de la FÉÉCUM, Joëlle Martin, s’est vue confrontée par l’animateur sur le sujet de l’endettement étudiant . Il est avéré que étudiants au N-B terminent leur bac avec, en moyenne, 35 000$ de dette (35 344$ en 2010-2011, précisément), le fait est indiscutable, mais l’intervieweur s’indigne :
«Mais que dire des étudiants qui ont un gros char et qui se payent des voyages ? Qu’est-ce que vous répondez à ça ?», rétorque-t-il.
Premièrement, que viennent-ils faire dans une entrevue sur l’endettement étudiant ? Nous n’avons pas, comme la plupart des gens, de pitié pour ceux qui s’endettent de manière démesurée et irresponsable et qui se plaignent ensuite que le fardeau du remboursement est trop lourd.
Ces étudiants «jet-set» existent-ils ? Oui, sans doute ; mais sont-ils la NORME ?
Et rien de surprenant à ce que ceux qui choisissent de dépenser leurs prêts étudiants d’une telle manière soient dans le jus quand vient le temps de rembourser, ou qu’ils soient aux abois quand la réalisation de la somme monstrueuse qu’ils doivent rembourser s’abat sur eux.
Mais – et c’est la beauté de la chose, ici – la RÉALITÉ est qu’il n’y a aucun besoin de se lancer dans des dépenses irresponsables pour s’endetter jusqu’au cou dans notre système postsecondaire. Pire que ça ; on peut compléter son programme dans le délai prévu (ou même avant, en faisant des cours d’été), en ne mangeant rien d’autre que du Mr. Noodle pis des toasts au beurre de pinottes, en portant le même linge (lavé une fois par semaine) pendant quatre ans – quelle aberration ! – et en demeurant parfaitement responsable dans ses dépenses, et QUAND MÊME s’en sortir avec une dette de 47 600$, plus intérêts.
Et, je vous en passe un papier, des intérêts il y en a. Graduez et attendez 6 mois, vous verrez.
Tout ça tient de la spéculation financière. Un document de l’Institut canadien de recherche socio-économique (IRIS) fait d’ailleurs état d’une possibilité inquiétante où l’éducation postsecondaire (ÉPS) pourrait bien devenir la prochaine «bulle» spéculative.
En bref, voici le raisonnement: la valeur perçue de l’éducation supérieure est une constante, alors que son coût, lui, ne l’est pas. Cela signifie que le seul argument de vente de l’ÉPS est sa valeur future. La «bulle» se crée lorsque les acheteurs, dans le but de s’enrichir, misent sur un produit dont la valeur future justifie le prix de l’achat – ou dans ce cas-ci, de l’emprunt ; et elle pète quand tout le monde en vient à la douloureuse réalisation que cette valeur ne sera jamais atteinte et que tout le monde s’est fait avoir. Ah, et que personne ne peut être remboursé, parce que l’argent n’a jamais existé puisqu’il n’existe que sous forme de crédit sur la valeur future du produit.
Avec un salaire moyen pour les diplômés sous la barre des 42 000$ au Canada, plus un taux de chômage de 15% pour ces mêmes diplômés, plus un taux de sous-emploi qui frise les 25%, on ne peut pas dire que la marmite d’or que l’on suppose présente au bout de l’arc-en-ciel de l’ÉPS soit un point de vente bien attrayant si l’on s’en remet à la logique.
Qui gagne à ce jeu ? Mais les banques, pardi ! Leur argent peut ne pas exister, mais votre dette, elle, est bien réelle, même gonflée au faux argent.
Je vous reviens là-dessus.
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